Le professeur Pierre Paradis vient de tourner la page sur 53 années de carrière en éducation. Avant de passer au chapitre de sa retraite, ce passionné de pédagogie a rassemblé la somme de ses expériences en un ouvrage, Guide pratique des stratégies d’enseignement et d’apprentissage, à l’attention des futurs enseignants et enseignantes.

 Originaire de Portneuf village (maintenant Ville de Portneuf), le professeur Paradis s’est joint à l’UQAR en 1980. Il venait alors de terminer un contrat de deux ans à l’UQAM comme professeur en kinésiologie. « Le poste sur lequel j’ai appliqué à l’UQAR était en psychomotricité. Au même moment, j’avais une offre pour un remplacement de deux ans à l’Université de Montréal, à l’école de psychoéducation. J’ai choisi l’UQAR et dès mon arrivée, j’ai été frappé par le rayonnement et la notoriété que les professeurs de l’Université avaient dans leur milieu. Il y avait un respect pour eux. Mon intégration à l’UQAR et à Rimouski a été très facile. »

Au fil des ans, le professeur Paradis a enseigné les théories de l’éducation et les stratégies d’enseignement d’apprentissage aux étudiantes et aux étudiants au baccalauréat en enseignement en adaptation scolaire et sociale et au baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire. Avant sa retraite, il a publié un Guide pratique des stratégies d’enseignement et d’apprentissage à l’attention des futurs enseignants et aux enseignants qui veulent réfléchir à leur pédagogie. Pas moins de 170 approches, stratégies et méthodes sont proposées dans ce bilan pédagogique d’une cinquantaine d’années.

« Ces diverses stratégies ne visent qu’un seul et même but : faire apprendre, souligne le professeur Paradis. Certaines sont brèves, d’autres se déroulent sur une plus grande période de temps. Les unes visent des acquisitions de connaissances, les autres servent à développer des habiletés cognitives plus évoluées. » M. Paradis a récemment produit un schéma sur une carte recto verso rassemblant ces stratégies pour un usage quotidien. « C’est une grande synthèse qui représente les éléments de connaissance pour aller enseigner au primaire. Au fond, c’est un outil pour préparer ses pédagogies du lendemain, tout en respectant le fonctionnement cognitif des élèves. »

Tout au long de sa carrière, le professeur Paradis a démontré une grande ouverture à l’utilisation de la technologie dans sa pédagogie. À la fin des années 1980, il a dirigé le projet Éducattention destiné aux élèves ayant un déficit d’attention. Se déroulant à l’école l’Annonciation de Nazareth, le projet consistait à utiliser des ordinateurs pour favoriser l’attention d’élèves. La Fondation Apple Canada a d’ailleurs participé au financement du projet en offrant cinq ordinateurs Apple SE (d’une valeur de 7000$ chacun !). « Quand les enfants étaient devant un ordinateur, ils n’avaient plus de problème d’attention », résume M. Paradis.

Ces dernières années, le professeur Paradis a également intégré les ordinateurs dans sa pédagogie en classe. « À un moment donné, j’ai commencé à avoir un problème dans mes cours : les étudiants n’écoutaient pas et certains consultaient leur cellulaire. J’ai donc décidé d’utiliser l’ordinateur comme outil de travail afin qu’ils construisent leurs connaissances et qu’ils s’approprient la matière. Pour avoir une bonne qualité d’enseignement, il faut mobiliser leur attention. La technologie permet d’atteindre cet objectif davantage que les cours magistraux. »

Titulaire d’un doctorat de l’Université Laval, M. Paradis a consacré sa thèse sur les enfants hyperactifs et le déficit d’attention. S’il a été un pourfendeur notoire du Ritalin du milieu des années 1980 au début des années 1990, le professeur Paradis a depuis changé son fusil d’épaule. « J’ai toujours cru qu’il y avait un moyen de faire quelque chose avec les enfants pour les rendre attentifs. Mais force est de constater qu’il s’agit à la base d’un problème neurochimique. On peut faire un parallèle avec quelqu’un qui est diabétique : ça prend de l’insuline pour contrôler son taux de sucre. »

Pierre Paradis a été le parrain professionnel de Jean Bernatchez lors de son arrivée à l’UQAR comme professeur en 2007. Il n’a que des éloges à l’endroit de son « parrain ». « Il a fait une grande différence dans ma vie professionnelle. J’ai toujours su que je pouvais compter sur lui. Sa contribution aux stratégies d’enseignement et d’apprentissage est majeure. Il a aussi une audace pédagogique peu commune, avec toujours un juste retour réflexif sur l’innovation et sur la capacité relative des individus et des organisations d’accueillir le changement. C’est aussi un collègue de travail très inspirant qui a contribué de manière déterminante à la vie départementale et institutionnelle. »

Malgré les années, la passion du professeur Paradis pour l’enseignement est demeurée intacte. « L’enseignement, c’est un défi continuel de s’assurer que tous les enfants apprennent et se rendent au bout de leurs apprentissages. C’est important. J’ai adoré la liberté académique que j’aie eue à l’UQAR. On m’a permis d’être créateur et innovateur. Maintenant, c’est avec sérénité que je peux tourner la page sur ces belles années et entreprendre un nouveau chapitre », mentionne M. Paradis.

Au cours des prochaines années, le professeur Paradis entend consacrer une bonne partie de son temps à la neuropsychopédagogie. « La neuropsychopédagogie permet de mieux comprendre le rôle du cerveau dans les apprentissages et les difficultés d’apprentissage. Les enseignants tireraient profit à intégrer les connaissances en neurologie dans leurs interventions auprès des élèves », conclut le professeur Paradis, qui est d’ailleurs membre du conseil d’administration de l’Association pour la recherche en neuroéducation.