Le temps d’attente aux urgences est un enjeu qui préoccupe à la fois l’ensemble de la population et les gestionnaires des établissements de santé. À l’urgence, le délai d’accès à une consultation médicale n’est évidemment pas déterminé par l’heure d’arrivée du patient, mais bien par la gravité de son état. Mais comment s’assure-t-on que l’évaluation des patients effectuée par l’infirmière au triage est faite correctement? Dans le cadre de sa maîtrise en sciences infirmières à l’UQAR, l’infirmier-clinicien Simon Ouellet évalue la fidélité d’un instrument de mesure de la qualité des triages infirmiers.
« Au Québec, une personne sur quatre âgée de plus de 15 ans s’est présentée aux urgences au moins une fois au cours de l’année. L’urgence demeure toujours la porte d’entrée principale du réseau de la santé. L’infirmière au triage détermine l’ordre de priorité des patients en procédant à une évaluation rapide (moins de 5 minutes) de chaque patient venant consulter, par une série de questions et par la prise de signes vitaux, afin de mieux cerner leur état de santé », explique M. Ouellet.
Le personnel infirmier se base sur les cinq niveaux de l’Échelle canadienne de triage (ETG) et de gravité afin de juger de la priorité du cas.
Source : OIIQ. Le triage à l’urgence, 2007.
Afin de s’assurer que les triages sont toujours effectués dans les règles de l’art, de garantir la qualité du processus et de déceler les correctifs à apporter le cas échéant, chaque gestionnaire d’urgence doit désigner des vérificateurs infirmiers pour réaliser des audits de qualité des triages à partir de la grille d’évaluation composée d’une quarantaine de critères, grille qui est utilisée dans l’ensemble des Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) du Québec depuis 2016.
« Comme plusieurs auditeurs devront évaluer la qualité des triages, il est important de mesurer la fidélité interévaluateurs de ce nouvel instrument de mesure. S’il y a une trop grande discordance entre les évaluateurs, il est impossible de savoir si les résultats de l’audit sont en lien avec la qualité des triages ou plutôt avec une erreur de mesure », indique le chercheur.
Réalisé sous la direction du professeur spécialiste des instruments de mesure et d’évaluation de la qualité des soins à l’UQAR Guy Bélanger, le projet de recherche de Simon Ouellet consiste à mesurer le niveau de fidélité interévaluateurs de l’outil de mesure « Audit triage 2016 ».
En collaboration avec l’unité d’urgence de l’hôpital de Rimouski, qui fait partie du CISSS du Bas-Saint-Laurent, Simon Ouellet a constitué un échantillon de 50 triages infirmiers selon cinq motifs de consultation : douleur thoracique angineuse, douleur abdominale, problème neurologique, trauma majeur et fièvre chez l’enfant. Ensuite, il a mandaté quatre auditeurs (infirmières d’urgences) pour procéder à l’évaluation avec l’outil de mesure « Audit triage 2016 ». Enfin, il a comparé les audits pour chacun des critères. « Par exemple, est-ce que les quatre auditeurs sont en parfait accord avec la cote de triage, le motif de consultation, les signes vitaux et les antécédents des patients? Le but de cet exercice est de faire ressortir les critères de l’instrument de mesure sur lesquels les évaluateurs ne s’accordent pas parfaitement », explique M. Ouellet.
« Les premières analyses révèlent que, même si certains critères de la grille l’instrument de mesure restent encore à clarifier, nous pouvons affirmer que l’« Audit triage 2016 » est un instrument de mesure fiable pour évaluer la qualité du triage à l’urgence. L’exercice réalisé déconstruit en quelque sorte le discours parfois alarmiste véhiculé dans les médias ou sur les réseaux sociaux à propos du temps d’attente à l’urgence. Le triage effectué est toujours évalué et les outils pour le faire sont fiables, ce qui peut rassurer la population à propos des mesures mises en place pour s’assurer de la qualité des soins. Autrement dit, une personne en arrêt cardiaque ou inconsciente verra un médecin rapidement! », assure M. Ouellet.
« Les études de 2e cycle m’ont permis de me spécialiser dans le champ d’expertise de l’évaluation de la qualité des soins infirmiers. Ce n’est pas seulement moi qui profite de cette démarche, c’est l’ensemble du réseau de la santé. Mon projet est un exemple qui démontre qu’à partir d’une situation réelle de la pratique infirmière, la recherche permet de développer des solutions concrètes basées sur les données probantes. Les infirmières et les infirmiers sont au cœur de l’action dans le secteur de la santé. Par la recherche, ils sont en mesure de prendre une plus grande place dans l’amélioration du réseau », conclut-il.
Diplômé au baccalauréat en sciences infirmières à l’UQAR, Simon Ouellet a reçu plusieurs bourses afin de se consacrer à temps plein à son projet de recherche, notamment celle du Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (20 000 $), celle du programme de bourses de leadership communautaire en santé et services sociaux d’Héritage Bas-Saint-Laurent conjointement avec l’Université de McGill (5 000 $) et celle d’Association des infirmiers et infirmières d’urgences du Québec (500 $).
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