Les coopératives représentent un important levier de développement économique des municipalités rurales. Affichant un remarquable taux de survie après cinq ans, ce modèle d’entreprise joue un rôle majeur de cohésion socioéconomique de leur milieu. Regard sur un moteur de la nouvelle économie de proximité.
Titulaire de la Chaire de recherche du Canada en développement rural, le professeur Bruno Jean s’est intéressé à la notion d’économie de proximité dans ses travaux de recherche effectués dans le cadre de l’Alliance de Recherche Université-Communauté (ARUC) – Développement territorial et coopération. « Historiquement, il y a un lien assez fort entre le développement des milieux ruraux et le modèle d’entreprises coopératives. Dans le fond, c’est le principe classique du crédit populaire qui est appliqué. En mettant en commun leurs épargnes, les ruraux permettaient à la caisse populaire d’avoir une force de frappe pour soutenir des projets de développement économique dans le milieu. »
Un nouveau modèle de coopérative a émergé dans le courant des années 2000. « Face aux difficultés que vivent les milieux ruraux à maintenir des services, des coopératives multiservices sont apparues. Certaines vont gérer un dépanneur qui a une station-service et qui abrite un point de service de santé et un bureau de médecin itinérant. Ces coopératives multiservices permettent de répondre à des besoins qui ne sont plus comblés par le secteur public ou privé », observe le professeur Jean.
On dénombre quelque 3300 coopératives et mutuelles actives au Québec. Regroupant 8,8 millions de producteurs, de consommateurs et de travailleurs, celles-ci œuvrent notamment dans les services financiers et les assurances, l’industrie agroalimentaire, l’alimentation, l’habitation, l’industrie forestière, les services funéraires, les soins de santé et les services.
Selon le titulaire de la Chaire de recherche du Canada en développement rural, les coopératives sont un excellent modèle de développement pour pallier le désintérêt de l’entreprise privée pour le milieu rural. « Dans les milieux ruraux dévitalisés, le modèle économique classique ne fonctionne pas bien, car il n’y a pas assez de consommateurs. Alors, il faut trouver un autre modèle. Le modèle coopératif est apparu dans le temps et réapparait aujourd’hui comme une solution plus viable pour à la fois développer des activités économique, s’offrir des services, augmenter la qualité de vie et favoriser l’implication des citoyens. »
Dans son rapport sur le Taux de survie des coopératives au Québec publié en 2008, le ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation illustre que les coopératives québécoises ont un taux de survie supérieur aux entreprises. Après cinq ans années d’activité, les coopératives de cinq employés et moins ont un taux de survie de 62,4 % comparativement à 33,7 % pour les entreprises. Après dix années d’activité, leur proportion est de 52,4 % contre 18,4 % pour les entreprises. Chez les coopératives de cinq employés et plus, le taux de survie après cinq ans est de 63 %, comparativement à 50,6 % pour les entreprises. Le taux de survie des coopératives de cinq employés et plus est de 38,2 % après dix ans, contre 33,8 % pour les entreprises.
Un outil de transfert de connaissances, intitulé Construire ensemble la carte d’une nouvelle économie de proximité, a été développé par l’ARUC développement territorial et coopération. Cet outil est disponible en ligne sur le site http://aruc-dtc.uqar.ca/. « Il est important de s’assurer que les acteurs sur le terrain s’approprient nos travaux de recherche. Une cinquantaine de thèses doctorales et de mémoires de maîtrise ont été réalisés dans le cadre des travaux de l’Alliance de recherche de 2007 à 2013 », précise le professeur Jean. Plusieurs pistes se dégagent de cet outil afin d’assurer un développement durable, dont la promotion et l’éveil des nouvelles générations à la coopération, l’augmentation de l’intercoopération et de la concertation territoriale, la consolidation des coopératives en place et la création de nouveaux secteurs de coopération.
Une chaire de recherche active
Le professeur Bruno Jean dirige la Chaire de recherche du Canada en développement rural depuis 2001. « La chaire travaille sur différents aspects du monde rural et des problématiques de développement des milieux ruraux, et ce, tant au Québec que sur la scène internationale. Nos recherches sont menées à la fois à la demande des milieux et dans une perspective d’avance des connaissances sur les réalités rurales », indique-t-il. Le développement régional est d’ailleurs l’un des axes d’excellence de l’UQAR.
Le gouvernement du Québec a interpellé la chaire pour évaluer sa politique nationale de la ruralité lancée en 2001. Puis, à l’occasion d’une révision de cette politique, l’équipe du professeur Jean a été sollicitée par le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire afin d’établir un outil pour mesurer la vitalité des communautés. « Pour nous, il s’agit d’un bel accomplissement que de voir des outils développés dans le cadre de nos travaux de recherche servir de façon aussi concrète pour les municipalités et le gouvernement », note M. Jean.
Depuis sa création, la Chaire de recherche du Canada en développement rural a réalisé des centaines de travaux de recherche. « Plus d’une douzaine étudiants gradués ont été impliqués dans ces travaux. Ceux-ci ont permis non seulement de faire avancer les connaissances sur les réalités rurales et de soutenir les initiatives de développement des communautés rurales, mais aussi de former des chercheurs spécialisés sur ces questions », conclut le professeur Jean.
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