Une nouvelle recherche menée par des biologistes de l’UQAR démontre que la forêt boréale est résistante à l’augmentation de l’activité des feux. Publiée dans la revue Proceeding of the National Academy of Science of the USA, cette recherche est basée sur une reconstitution de feux survenus au cours des 200 dernières années dans le Nord du Québec.
Signée par l’étudiante graduée à la maîtrise en gestion de la faune et des habitats Jessie Héon, le professeur Dominique Arseneaultet Marc-André Parisien, du Service canadien des forêts, l’étude indique qu’une activité extrême de feux pourrait être soutenue par des sècheresses occasionnelles qui provoquent des feux immenses. En revanche, ces feux rajeunissent la forêt sur de grandes superficies et diminuent l’abondance des combustibles, ce qui permet à la forêt boréale de résister à l’augmentation de l’activité des feux.
Afin de vérifier comment les feux se recouvrent les uns les autres dans le temps, les biologistes ont réalisé une reconstitution de l’étendue des feux depuis le 19e siècle sur une portion de 190 kilomètres de la route de la Baie James, route qui relie les villes de Matagami et de Radisson, dans le Nord du Québec. Pour se faire, ils ont récolté près de 2000 marques laissées par les feux sur les troncs des arbres et ont utilisé les cernes annuels de croissance des arbres pour dater l’année de formations de ces blessures.
« Nous avons testé l’idée largement répandue, mais difficile à vérifier, que les feux successifs se propagent et se chevauchent indépendamment du temps qui les sépare, parce que leur occurrence dépend beaucoup plus des sècheresses extrêmes que du rétablissement de la végétation et de l’accumulation des combustibles entre les feux », explique Mme Héon.
Plusieurs feux immenses ayant croisé la route de la Baie James sur plus de 50 kilomètres lors d’années exceptionnellement sèches, soit en 1922, en 1941, en 1989 et en 2013, ont été détectés par l’équipe de chercheurs de l’UQAR. « Cette répétition de grands feux à la faveur des années de sècheresses sévères indique que les craintes des écologistes sont justifiées à l’effet que le réchauffement climatique pourrait mener à une plus grande activité de feux », observe le professeur Arseneault.
Cette augmentation potentielle de l’activité des feux n’est toutefois pas sans limite, poursuit le professeur de biologie de l’UQAR. « En mesurant la durée des intervalles de temps qui ont séparé les feux successifs le long de la route, on a observé des intervalles beaucoup plus long que ceux auxquels on aurait dû s’attendre si les feux s’étaient propagés à travers la région sans être limités par le temps écoulé depuis les feux précédents. »
Ainsi, en plus des sècheresses, l’occurrence des feux dépend également du temps pendant lequel la forêt peut se développer et accumuler des combustibles pour soutenir la propagation du prochain feu. « Les chances qu’un nouveau feu recouvre un feu précédent augmentent progressivement pendant les cinquantes premières années pour se stabiliser par la suite. Ce phénomène de résistance est donc très important dans les régions où il y a beaucoup de jeunes forêts », conclut Jessie Héon.
Les auteurs de l’étude estiment que ces nouvelles connaissances pourraient être utiles pour prévoir où les prochains grands feux risquent le plus de se produire, et une fois qu’ils seront déclarés, de prévoir dans quelles forêts ils risquent le plus de se propager. L’article « Resistance of the boreal forest to high burn rates » est publié dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences of the USA.
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