Joanie Turmel
Étudiante de maîtrise en travail social à l’UQAR au campus de Lévis
En 2019, la rivière Chaudière sort de son lit et sème une désolation qui passera à l’histoire : environ 975 bâtiments inondés, 1 600 personnes touchées, 700 personnes évacuées et 400 maisons démolies. À titre de travailleuse sociale, j’interviens en Beauce. Mon patelin d’origine est touché de façon récurrente par ses débordements. J’ai développé un intérêt et une sensibilité face à cette problématique méconnue. Il y a peu d’écrits par rapport aux différents impacts liés à la démolition de sa résidence, un très gros deuil. J’ai ressenti un besoin de développer des connaissances pour mieux intervenir; être utile pour ma communauté. J’ai décidé alors d’étudier les besoins psychosociaux des hommes touchés par les mesures d’atténuation du risque déployés à la suite des inondations de 2019 en Chaudière-Appalaches.
— Joanie Turmel
L’intérêt de Joanie pour l’eau et la glace
« Ouragans, tornades, vagues de chaleur, inondations. Des événements dont on entend de plus en plus souvent parler, particulièrement avec ce qui se passe en Colombie-Britannique ces jours-ci. Ces catastrophes touchent souvent Haïti, Philippines et de plus en plus… le Québec. Les changements climatiques touchent tout le monde », explique la travailleuse sociale, Joanie Turmel.
En 2019, lorsque la rivière Chaudière sort de son lit et sème une désolation qui passera à l’histoire, Joanie intervient en Beauce. Son patelin d’origine est touché de façon récurrente par ses débordements. « La rivière Chaudière fait partie des rivières au Québec qui compte le plus d’inondations. À Sainte-Marie en 2019, on parle d’environ 975 bâtiments inondés, 1 600 personnes touchées, 700 personnes évacuées et 400 maisons démolies. »
Déjà sensibilisée face aux inondations depuis son enfance, elle œuvrera dans le cadre d’un mandat spécifique d’intervention auprès des personnes sinistrées. « Plusieurs personnes ont vu leur maison être démolies. J’ai remarqué que peu d’hommes ont demandé par eux-mêmes de l’aide formelle au CISSS; c’est parfois difficile de faire accepter cette aide, par ceux qui n’ont souvent jamais baissé les bras, qui sont demeurés forts, et qui tiennent à s’organiser seuls. »
« J’ai développé un intérêt et une sensibilité face à cette problématique méconnue. Il y a peu d’écrits par rapport aux différents impacts liés à la démolition de sa résidence. C’est pourtant un très gros deuil et nous avions peu ou pas d’outils cliniques pour intervenir. J’ai ressenti un besoin de développer des connaissances pour mieux intervenir; être utile pour ma communauté. »
Joanie Turmel décide alors de retourner aux études d’y consacrer son projet de maîtrise en travail social à l’UQAR au campus de Lévis. Elle est dirigée par Marie-Hélène Morin, professeure en travail social et codirigée par Lily Lessard, professeure en sciences infirmières. Son parcours collégial et son expérience clinique l’amèneront à étudier les besoins psychosociaux des hommes touchés par les mesures d’atténuation du risque déployés à la suite des inondations de 2019 en Chaudière-Appalaches.
Diplômée du Cégep de Sainte-Foy en éducation spécialisée où elle s’est méritée une bourse d’excellence, Joanie a complété deux stages en Beauce. Le premier au Centre le portage pour aider les jeunes ayant des problèmes de toxicomanie, le second au CRC Beauce, principalement auprès d’hommes judiciarisés en réinsertion sociale. « En TES, j’ai surtout appris à travailler avec la personne dans son quotidien. En travail social, je voulais optimiser mes compétences et mes connaissances et, aussi, accroître mes connaissances, avoir une vision plus globale d’une personne et d’une communauté, avoir une vision holistique et écosystémique, de prendre en compte l’individu dans son environnement ».
« Appartenance » est le mot qui lui vient en tête pour décrire son passage à l’UQAR. « Je me sens chez nous ici, et ce, dès que j’y suis entrée, notamment en raison de la taille des groupes, des liens de proximité que j’ai pu développer avec les enseignants accueillants et disponibles. Les valeurs de l’UQAR me rejoignent, dont l’importance accordée à l’expérience étudiante, aux enjeux locaux, au développement de la région et tout l’aspect de la reconnaissance », soutient-elle.
C’est pour mieux comprendre les différentes problématiques que les gens peuvent vivre, travailler tant avec les collectivités, les groupes et les individus, et augmenter ses perspectives d’emploi qu’elle a entamé sa maîtrise. « Cela me permettait de développer ma capacité réflexive et d’analyse; j’adore, surtout en recherche, pousser ma compréhension des problématiques,développer des connaissances, toujours chercher à faire mieux, améliorer les pratiques et cela me passionne », affirme Joanie.
Bachelière en travail social de l’UQAR depuis la fin 2019, elle souligne toute la richesse de son parcours universitaire. « Mes professeures m’ont accompagné à accroitre mes connaissances et développer mes compétences. Elles tiennent compte du point de vue étudiant, accordent de l’importance au changement social et développent notre conscience professionnelle. Elles m’ont amené à développer ma capacité réflexive et analytique ainsi que mes habiletés relationnelles. Surtout, développer ma passion au plus haut point. »
Joanie a récolté plusieurs bourses, dont une du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) depuis mai 2021 et de plusieurs réseaux de recherche, du Réseau intersectoriel en santé de l’Université du Québec (RISUQ), du Réseau Inondations InterSectoriel du Québec (RIISQ) ainsi que de la Chaire interdisciplinaire sur la santé et les services sociaux pour les populations rurales (CIRUSSS). Elle fut l’une des deux gagnantes du Prix Dr-Luc-Bélanger-Ma thèse en 180 secondes [https://www.facebook.com/watch/?v=844472056422232] du Centre de recherche du CISSS de Chaudière-Appalaches.
Gardienne de but pour des équipes masculines de hockey sur glace, elle pratique depuis l’enfance ce sport qu’elle affectionne particulièrement, principalement pour l’esprit d’équipe. « J’ai joué au niveau secondaire en sport-études à Saint-Joseph et même pendant mes études tant collégiales qu’à l’université. Ça m’a permis de connaître plusieurs endroits et différents milieux au Québec, de me promener et de travailler en équipe », raconte-t-elle.
Ses projets dans le futur? « Pouvoir jumeler l’enseignement avec la recherche et garder un pied sur le terrain au niveau clinique pour pouvoir donner des exemples concrets et pratiques. »
Participante à un projet de recherche de Lily Lessard, elle est heureuse de pouvoir à son tour y contribuer en tant que coordonnatrice. « Cela me permet de voir qu’on peut vraiment changer les choses par l’entremise de la recherche ». Maintenant, Joanie a envie que les hommes l’aident à mieux les aider, en lui racontant ce qu’ils ont vécu pour mieux comprendre leurs réalités, leurs impacts et, surtout, les stratégies utilisées pour s’en sortir.