Une équipe dirigée par le professeur en génie mécanique Noureddine Barka a conçu un maillon faible à double seuil visant à réduire le risque d’empêtrement de la baleine noire de l’Atlantique Nord dans les engins de pêche au crabe des neiges. Une innovation prometteuse pour la survie de ce cétacé qui fait partie des espèces en péril depuis 2005.
Selon le Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM), on dénombre environ 400 baleines noires dans le golfe du Saint-Laurent. Depuis quelques années, Pêches et Océans Canada et Transports Canada ont mis en place des mesures pour réduire le risque d’empêtrement dans les filets de pêche et de collision avec les navires, dont la fermeture de zones de pêche fréquentées par la baleine noire.
« Lorsque des baleines sont repérées dans une zone de pêche, celle-ci est fermée et les pêcheurs n’ont que quelques heures pour aller retirer tous les casiers qu’ils y ont posés. Diverses stratégies ont été tentées afin de poursuivre la pêche dans ces zones, comme des cordages ayant un seuil de rupture de 1700 livres ou des bouées jaillissantes, qu’on appelle des bouées pop-up, mais ces solutions sont soit trop fragiles, soit trop coûteuses. C’est pour résoudre ces problèmes que nous avons développé un maillon faible à double seuil », explique le professeur Barka.
Cette invention vise à permettre à une baleine qui est empêtrée de se libérer en quelques minutes. « Le maillon faible à double seuil a été conçu pour qu’une baleine se libère en 5 à 6 minutes sous 1700 livres de tension. Il résiste en outre à des tensions pouvant atteindre 3500 livres pendant au moins 3 minutes, ce qui permet aux pêcheurs de remonter leurs casiers en toute sécurité sans changer leur façon de pêcher », poursuit le professeur Barka.
Le développement du maillon faible à double seuil a nécessité plus de quatre années de travail depuis 2019. « Nous avons développé trois versions de prototype. Le principal défi était de créer un dispositif qui résiste à de fortes tensions pour que les pêcheurs puissent remonter leurs cages sans les perdre si le maillon se détache trop tôt. En revanche, il fallait que le dispositif se détache rapidement si une baleine s’empêtre dans le cordage. Nous avons résolu ces deux défis grâce au double seuil », mentionne le professeur en génie mécanique.
Après plusieurs essais de solidité en laboratoire à l’UQAR, le maillon faible à double seuil a été testé lors de sorties en mer au large des Îles-de-la-Madeleine. « Notre système a le grand avantage de modifier le moins possible les activités de pêche. Le dispositif est facile d’utilisation, sécuritaire, réutilisable et procure une grande autonomie aux pêcheurs qui le manipulent », observe Noureddine Barka. Mentionnons que l’auxiliaire de recherche Slim Mougou a participé à toutes les étapes de développement depuis l’automne 2020.
Le maillon faible à double seuil de MM. Barka et Mougou a été développé avec le concours de plusieurs partenaires, dont Merinov, le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), les Industries Fipec, le ministère des Pêches et des Océans, l’Association des crabiers gaspésiens et l’organisme subventionnaire Mitacs Accélération.
Selon le président de l’Association des crabiers gaspésiens, copropriétaire et président des Industries Fipec, Daniel Desbois, la nouvelle technologie développée par l’équipe du professeur Barka répond aux besoins de l’industrie de la pêche au crabe des neiges. « L’équipement est facile d’utilisation pour les pêcheurs. Il ne change pas leurs habitudes de pêche et il permet à une baleine de se désempêtrer plus facilement en diminuant la tension de façon importante. C’est gagnant pour tout le monde. » Un groupe d’investisseurs a montré son intérêt à commercialiser le maillon faible à double seuil développé par l’équipe de l’UQAR.
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