Les eiders à duvet, ces canards marins présents durant l’hiver sur les rives du Saint-Laurent, migrent l’été vers de petites îles de l’Arctique pour se reproduire loin des prédateurs. Dans un contexte où le Nord se réchauffe, l’étudiante au doctorat en biologie Loreleï Guery étudie la survie et le succès reproducteur de cette espèce connue pour être sensible aux fluctuations climatiques.
Mme Guéry suit la démographie de trois colonies d’eider nichant l’été dans l’Arctique : une sur l’île de Southampton, au Nunavut; une à Ny-Ålesund, la localité la plus nordique au monde; et une à Tromsø en Norvège, au nord du continent européen. « Des études sur ces oiseaux ont été menées sur ces trois sites depuis plus de 15 ans. Par conséquent, les données scientifiques sont disponibles pour établir un lien entre les variations climatiques et les variations démographiques de l’oiseau au fil des années, puis comparer la réponse des différentes populations à ces variations », explique la chercheuse.
Loreleï Guéry cherche à comprendre et à prédire la réponse de la faune aux fluctuations climatiques en cours et à venir. « La plupart des études qui portent sur le sujet mettent l’accent sur une seule population d’une espèce. Cependant, il est possible que des populations répondent de façon différente aux changements dans leur environnement. Il s’avère donc nécessaire d´étudier et de prendre en compte ces différences », insiste la doctorante.
Pour suivre les eiders, l’équipe de recherche capture les oiseaux lors de leur reproduction dans l’Arctique pour les munir de bagues d’identification et d’appareils miniatures de géolocalisation. L’été, les individus sont identifiés et les variables biologiques, comme la taille des couvées, sont suivies. Des données sur la température de l’air, de l’eau, sur la force des vents et même sur le taux d’humidité sur les aires de reproduction et d’hivernage sont retenues pour essayer d’expliquer les variations interannuelles du succès reproducteur. Ainsi, des comparaisons sur la réponse démographique aux variations environnementales sont dressées tout au long de l’année entre les individus et entre les colonies.
Les observations sur le terrain révèlent qu’au cours des dernières années, la colonie canadienne a particulièrement été éprouvée par le choléra aviaire, une infection contagieuse qui se traduit par une mortalité élevée. « On sait que cette maladie se transmet par l’eau. Dans un contexte de réchauffement climatique, s’il fait plus chaud et plus sec, les oiseaux devront s’abreuver plus souvent. Les points d’eau se faisant plus rares amèneront un regroupement de ces oiseaux, d’où une transmission plus élevée de la maladie », explique Mme Guéry. La compréhension de l’impact des évènements passés sur la démographie des eiders à duvet permettra de prédire la réponse future de ces populations sous l’influence de maladies et de variations climatiques.
Le projet de recherche de Mme Guéry est réalisé sous la supervision du professeur en écologie des communautés animales Joël Bêty, également directeur-adjoint du Centre d’études nordiques (CEN), un centre d’excellence interuniversitaire. Le professeur Sébastien Descamps, du Norwegian Polar Institute et éditeur académique pour PloS One, en est le codirecteur. Enfin, la chercheuse spécialisée en oiseaux migrateurs marins Stéphanie Jenouvrier du Woods Hole Oceanographic Institution (États-Unis) agit comme collaboratrice principale.
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