Le changement de saisons expliquerait le renouvellement d’eau à différentes profondeurs dans le fjord du Saguenay. Dans le cadre de sa maîtrise en océanographie physique, Mélany Belzile étudie les courants marins de l’Estuaire qui renouvellent les eaux du fjord et qui en font un milieu propice à la prolifération d’une multitude d’espèces.
Le renouvellement des eaux par l’estuaire du Saint-Laurent apporte l’oxygène nécessaire à la vie dans le fjord. « Contrairement à plusieurs autres fjords, les profondeurs du Saguenay sont très bien oxygénées et cela est dû aux échanges d’eau avec le Saint-Laurent », explique Mme Belzile. Ces renouvellements ont aussi le potentiel de transporter des poissons de l’estuaire au fjord. Les larves de certaines espèces (morue, sébaste, flétan du Groenland) ont un taux de survie très faible dans le Saguenay. La survie de l’espèce est donc due au transport des juvéniles depuis le Saint-Laurent.
En février 2011, le directeur de recherche de Mme Belzile, le professeur en océanographie physique à l’Institut des sciences de la mer (UQAR-ISMER) Daniel Bourgault, a dirigé la mission scientifique SAGWIN (l’abréviation de Saguenay – Winter) dans le Parc marin du Saguenay–Saint-Laurent. Cette mission, qui regroupait une vingtaine de chercheurs en sciences de la mer, visait à améliorer les connaissances sur le fjord en hiver, tant sur les plans physique, chimique que biologique. Les données recueillies par les biologistes ont alors révélé d’étranges variations dans les nutriments, qui pourraient être dues à la circulation engendrée par le renouvellement des eaux.
Le projet de recherche de Mélany Belzile vise à étudier, sur une période de plusieurs mois, la circulation des masses d’eau entre le fjord du Saguenay et l’estuaire du Saint-Laurent, pour expliquer cet approvisionnement au « garde-manger » du fjord. Le chercheur en océanographie physique à Pêches et Océans Canada Peter Galbraith, spécialiste du mélange océanique des masses d’eaux du golfe du Saint-Laurent, agit comme codirecteur dans le projet.
À l’aide de thermomètres, de courantomètres et de senseurs de salinité installés à différentes profondeurs – jusqu’à 250 mètres – la chercheuse a été en mesure d’identifier les différentes masses d’eaux. Elle a toutefois observé un phénomène inattendu.
« Il était déjà connu qu’en période estivale, les renouvellements d’eau se produisaient via la couche intermédiaire et, qu’en hiver, c’était via la couche de fond. Mais nos résultats montrent que c’est au mois de février, en plein cœur de l’hiver, sur une période d’à peine deux à trois jours, que tout a basculé. Les eaux salées de l’estuaire plongeaient vers le fond du fjord et, tout à coup, tout a changé et les entrées d’eaux se glissaient à une profondeur plus faible », explique la chercheuse.
Ce basculement pourrait être expliqué par un changement dans la circulation du Saint-Laurent en février. Selon la saison, les eaux de l’estuaire disponibles pour renouveler le fjord ne sont pas les mêmes et n’ont donc pas la même densité. Ces eaux flotteront ou couleront sur les eaux qui se trouvaient déjà dans le fjord. Comme de l’huile qui flotte sur de l’eau à cause de sa densité plus faible, les eaux douces et chaudes sont plus légères et flottent sur les eaux froides et salines.
L’étude des courants marins prend également tout son sens dans le contexte de changements climatiques. « Dans l’éventualité où il y a moins de glace qui se forme à la surface des eaux, celles qui renouvellent les fonds pourraient ne plus être assez denses, et les renouvellements, capitaux pour la santé des écosystèmes profonds, pourraient en être grandement affectés », conclut Mme Belzile.
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