Je travaillais encore à l’UQAR, comme graphiste, lorsque j’ai commencé à faire du bénévolat. Treize années se sont écoulées depuis, et je suis encore là, le lundi soir de 18 h 30 à 21 h 30, et même plus, pour l’Association du cancer de l’Est du Québec, à l’Hôtellerie Omer-Brazeau de Rimouski.
Parler de bénévolat, c’est parler aussi des expériences vécues qui nous ont amenés à donner du temps à des gens qui vivent des moments difficiles. En 1986, ma femme Claude, qui travaillait à cette époque comme secrétaire pour notre syndicat à l’UQAR, a reçu un diagnostic de cancer. Elle a passé quatre semaines à Québec pour des traitements de radiothérapie, pour guérir un cancer du sein. Elle avait accouché seulement quelques mois auparavant.
En 1990, après une rencontre avec M. Omer Brazeau, elle s’est impliquée bénévolement dans un nouveau projet. M. Brazeau voulait instaurer à l’Hôpital de Rimouski des traitements de radiothérapie pour soigner efficacement des gens atteints de cancer. En plus, il souhaitait construire une hôtellerie, annexée à l’hôpital, qui pourrait accueillir et héberger des gens de la Gaspésie, de la Côte-Nord et de tout le Bas-St-Laurent. Ces gens n’auraient plus à s’exiler à Québec pendant quatre à sept semaines, loin de leur famille, pour recevoir ce qu’il leur est dû, soit des traitements à la fine pointe de la technologie. L’hôtellerie est devenue aujourd’hui un outil indispensable dans notre région.
Quelques années après le décès de Claude, qui a été victime d’une récidive de son cancer, j’ai suivi en 2003 une formation pour être bénévole au groupe d’entraide et d’accompagnement Perce-Neige. Être bénévole Perce-Neige, c’est s’engager pour une mission de mieux-être envers les personnes touchées par le cancer. Ce rôle, nous le jouons à l’Hôtellerie, au centre de cancer de l’hôpital, mais aussi chez les gens qui en font la demande. Notre but premier est l’écoute, l’entraide, le soutien et l’information pour la personne qui est en traitement et celui ou celle qui l’accompagne.
Je me rappelle avoir dit à la monitrice, lors de ma formation, que je voulais m’impliquer à rencontrer des personnes, pas des « malades ». Mes amis me demandent souvent : « ça ne doit pas être drôle là… ». Pourtant, je peux dire que j’ai vécu à cet endroit des moments de rigolades et de fous rires avec des gens généreux et ouverts aux autres. J’ai pu voir se développer des amitiés sincères. À la fin des traitements, certains départs sont déchirants.
Mon temps à l’Hôtellerie consiste à rencontrer les personnes qui y demeurent pendant des semaines, à vivre un moment de vie avec elles, à discuter simplement, à partager leurs préoccupations. Ce sont des personnes qui doivent non seulement réorganiser toute la routine de leur vie quotidienne, mais surtout, recevoir la chimiothérapie ou la radiothérapie, et parfois les deux en même temps. Ces personnes sont souvent accompagnées de leur mari ou de leur femme, mais on trouve aussi des gens qui sont tout seuls dans cet épreuve.
Ce que toutes ces personnes vivent frise l’extrême. C’est leur vie qui est en jeu. Mais lorsque tu les côtoies, tu te rends compte qu’elles sont toutes extrêmement courageuses et qu’elles veulent à tout prix recouvrer la santé. Lors de mes rencontres, rares sont les personnes qui te parlent de leur état de santé actuel. Elles préfèrent de beaucoup discuter de la vie, des expériences qu’elles ont vécues. Les personnes qui vivent à l’Hôtellerie partagent entre elles la sincérité, la compassion et l’entraide. Il n’y a plus de classes sociales, elles se retrouvent là toutes sur le même pied.
On dit souvent que le monde est petit : il y a parfois des gens qui se sont connus il y a très longtemps, soit pour le travail ou pour d’autres occasions, et qui, par hasard, se revoient là, aujourd’hui, aux prises avec une problématique de cancer.
Si, par mon action, j’ai l’impression d’avoir pu faire oublier à ces personnes ne serait-ce qu’une minute leur situation de malade, je suis le plus heureux des hommes. Lorsque que je quitte l’Hôtellerie en fin de soirée, j’ai toujours ce sentiment au cœur d’avoir reçu beaucoup plus que ce que j’ai donné.
J’ai beaucoup de respect pour le dévouement de bénévoles pour des causes aussi nobles que la Maison Marie-Élisabeth, Moisson Rimouski-Neigette, Centraide, et plus encore, pour tous ceux et celles qui s’impliquent pour des clubs sociaux, sportifs et autres. Un constat s’impose : s’il n’y a plus de bénévolat, il n’y a plus d’organismes viables.
En te remémorant le fil de ta vie, tu constates qu’elle a été bonne pour toi, même avec des petits problèmes de santé ou des ennuis financiers. Si tu le veux, tu peux te tourner vers ceux et celles qui ont vraiment besoin d’aide. Lorsque tu t’approches de ceux qui souffrent physiquement et psychologiquement, ton sentiment d’être en vie est encore plus grand et tu l’apprécies davantage. Aider l’autre te rend plus vivant, plus satisfait.
Chacun peut donc jouer un rôle dans notre société. Il s’agit de chercher et de trouver là où on sera le plus utile. Et ayant trouvé ce domaine d’intérêt, une implication bénévole rapportera tellement de bonheur. Donc, soyez heureux…
Pour nous soumettre une nouvelle : communications@uqar.ca