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Le futur de Texas : les Latinos, par Mario Bélanger

Dans les trois États les plus peuplés du Sud des États-Unis (Californie, Floride et Texas), près de la moitié de la population actuelle a des origines hispanophones. En considérant que cette population, qu’on appelle les Latinos, a un taux de natalité plus élevé que la moyenne nationale, la situation politique et linguistique pourrait connaître des changements majeurs dans les prochaines années. Un aperçu de la situation au Texas devient éclairant.

Alexandre Couture Gagnon

Originaire de Rivière-du-Loup, détentrice d’un doctorat de l’Université Carleton (Ottawa), Alexandre Couture Gagnon travaille maintenant comme professeure en administration publique à l’Université du Texas à Rio Grande Valley. Cette ville de 180 000 habitants est située complètement au sud du Texas, tout près de la frontière mexicaine.

Pour discuter de la situation là-bas, Mme Couture Gagnon a présenté le 2 mars 2018 à l’UQAR, en direct du Texas, une vidéoconférence devant une trentaine de personnes. L’activité était organisée par l’Association des aînés de l’UQAR et l’Association des retraités de l’UQAR.

Les Latinos représentent 54 millions d’habitants aux États-Unis. Ils proviennent surtout de Cuba, du Mexique et de Puerto Rico, mais aussi de l’Amérique centrale et de l’Amérique du Sud. Même s’ils ont la langue espagnole en commun, ils ont des intérêts très variés. Les ressortissants cubains qui appuient la pression américaine sur le régime Castro, tout comme les gens plus fortunés, ont tendance à appuyer le Parti républicain. Par contre, la majorité des autres Latinos appuient le Parti démocrate.

Une portion importante des Latinos, ceux qui habitent aux États-Unis depuis longtemps, ne parlent même plus espagnol. D’ailleurs, l’école américaine s’efforce de les intégrer rapidement à la langue anglaise.

« L’identité des États-Unis est en redéfinition », constate Mme Couture Gagnon. Le taux de fertilité des Latinos est de 2,4 par famille, alors qu’il est de 1,8 pour les Blancs et de 2,1 pour les Noirs. « Sur le plan politique, le Texas vote majoritairement pour le Parti républicain, surtout en milieu rural, mais le vote pour le Parti démocrate est très fort dans les grandes villes. La situation pourrait facilement s’inverser dans les prochaines années. Déjà, les jeunes Latinos sont majoritaires dans plusieurs écoles texanes. Leur poids politique va devenir important. »

Selon les sondages, 64 % des Latinos seraient en faveur du Parti démocrate, mais en réalité, seulement 40 % de ceux-ci votent. Il faut des cartes d’identité spéciales pour avoir accès au scrutin, comme le passeport ou le permis de conduire, et plusieurs Latinos et Noirs ne les possèdent pas.

Le Texas est en forte croissance économique et il attire des gens de partout au monde. Cela amène une augmentation de 2 % par année dans cet État qui compte maintenant 28 millions d’habitants. Et bien sûr, les Mexicains, qui sont très nombreux au sud de la frontière américaine, cherchent par tous les moyens à travailler au Texas. Les salaires et les conditions de travail y sont souvent meilleures qu’au Mexique.

Les autorités texanes craignent beaucoup cette affluence mexicaine à la frontière. Elle est souvent associée aux drogues et aux violences qui entrent au pays. Seulement dans le sud du Texas, pas moins de 3000 agents se promènent sur les routes bordant le Rio Grande, avec caméras, jeeps et hélicoptères, pour empêcher les immigrants d’entrer illégalement.

La langue espagnole est ainsi considérée au Texas comme synonyme de misère, de bas salaires, de zones de taudis. Aussi, plusieurs Latinos préfèrent utiliser la langue anglaise, question de hausser leur standing social. Pourtant, 29 % des Texans affirment qu’ils parlent espagnol à la maison.

D’un autre côté, les écoles, les universités et les bibliothèques du Texas semblent très ouvertes à accueillir avec gentillesse les populations immigrantes, qu’elles viennent du Mexique ou d’ailleurs. De nombreuses affiches y sont bilingues : anglais et espagnol. Et on se refuse de demander l’origine lorsque les gens s’inscrivent à une activité ou à un cours.

« Les Latinos ont une image ambivalente au Texas, estime la conférencière. Ils prennent de plus en plus de place. Les tensions existent. Mais paradoxalement, par l’instruction et les services, il y a un réel effort de les intégrer. Dans le fond, on sait que des citoyens bien éduqués et bien dorlotés réussissent à mieux s’adapter, peu importe d’où ils proviennent. »

Pour nous soumettre une nouvelle : communications@uqar.ca