Kaléidoscope historique
Ce colloque est organisé et présenté par un comité d’étudiants, appuyé par des professeurs. Il leur permet de diffuser leurs travaux de recherche tout en se familiarisant avec l’organisation et le déroulement d’un véritable colloque scientifique.
Les présentations abordent des thèmes très variés allant de l’histoire régionale à l’histoire internationale, toutes périodes confondues, qui témoignent autant de la diversité des intérêts des étudiants que de celle des formations offertes par les programmes en histoire.
Trois récompenses sont remises aux communicatrices et communicateurs qui se démarquent : le prix du jury et le prix du public. En 2023 s’ajoute la bourse de la SNEQ créée afin d’encourager la recherche et la diffusion en histoire du Québec.
Le 15e colloque annuel s’est tenu à la bibliothèque Lisette-Morin de Rimouski, le 17 mars. Au total, 10 étudiantes et étudiants présentent sept (7) conférences.
« Pour plusieurs, il s’agissait de leur première présentation de recherche devant public. C’était une belle occasion de présenter les résultats d’un travail qui nous tenait à cœur, mais aussi une expérience enrichissante à mettre à notre CV. Nous sommes vraiment fiers d’avoir vécu cet événement avec toutes ces personnes intéressées au patrimoine », mentionne la responsable des relations publiques de l’association et étudiante à la maitrise, Émilie Cormier.
Deux prix ont été remis à des étudiants et étudiantes pour souligner la qualité de leur intervention. Le prix du jury de 200 $ a été remis par le Fonds de soutien aux projets étudiants a été décerné à Dominic Thibeault, étudiant de première année au baccalauréat en histoire, pour sa communication « Un mercenaire allemand parmi les Canadiens français : le cas de Philip Long ». Le jury, composé de Sabrina Gendron (directrice de la Société rimouskoise du patrimoine), Sophie Turbide (professeure au cégep de Matane) et Virginie Hébert (professeure à l’INRS-UQAR) ont souligné le dynamisme de la présentation, l’utilisation judicieuse des sources historiques et le caractère original du sujet. Cette présentation portait sur l’intégration, sur trois générations, d’un mercenaire allemand et de sa famille à la société canadienne-française et catholique du Témiscouata et du Madawaska au 18e siècle. Quant au prix du public de 200 $, offert par la librairie L’Alphabet, est allé à Rosalie Gaudreault et François Sergerie Saint-Jacques, étudiants du baccalauréat en enseignement secondaire, pour leur présentation intitulée « Les politiciennes québécoises vues par les médias : les cas de Marie-Claire Kirkland-Casgrain, Lise Bacon et Pauline Marois ». Cette communication mettait en lumière la façon dont les journalistes et les caricaturistes ont rendu compte des carrières de ces trois politiciennes depuis l’élection la première députée en 1961 en mettant l’accent sur la persistance des stéréotypes de genre.
Finalement, la Société nationale de l’Est-du-Québec, par l’entremise de son président, Alain Martineau, avec la complicité du corps professoral du programme d’histoire de l’UQAR, a profité de cet événement pour remettre une bourse de 500$ à deux étudiantes. Cette bourse récompense des étudiantes ou des étudiants qui font preuve d’initiative, de créativité et d’autonomie dans l’élaboration et la réalisation d’un projet personnel. Les lauréates du concours 2023 sont Marie-Ève Lajeunesse-Mousseau et Émilie Cormier, toutes deux étudiantes à la maîtrise en histoire, pour leur projet intitulé « La Maison brune et les maisons de couleur. Une manifestation de la contre-culture dans l’Est-du-Québec ». « Le projet se distingue par sa qualité, son originalité et sa pertinence. Portant sur la manière dont la contre-culture s’est manifestée à Rimouski et dans l’Est-du-Québec depuis les années 60, à travers des lieux iconiques de la vie étudiante, les fameuses “maisons de couleur”, le projet s’attarde à un exemple précis de ce patrimoine social. Ce projet constitue un bel exemple d’application concrète de la recherche historique et de la volonté de jeunes historiennes de prendre part au débat public, en tirant profit de toutes leurs expertises accumulées au cours de leurs études », a souligné Maxime Gohier, professeur d’histoire du Département des lettres et humanités de l’Université du Québec à Rimouski lors de la remise de la bourse. « Les résultats annoncés laissent entrevoir une réelle avancée de nos connaissances sur l’histoire et le patrimoine rimouskois, en plus de s’inscrire résolument sur la scène régionale et nationale. La Maison brune, aujourd’hui menacée de démolition, est l’une des dernières représentantes de ces lieux qui scandent le paysage de la ville depuis la création du cégep et de l’université. Elle est, à ce titre, témoin de plus de cinquante ans d’histoire de la jeunesse dans l’Est-du-Québec ».
Les modèles antiques de la monarchie française
Par Romain Landes, étudiant en échange CREPUQ, baccalauréat en histoire
Des premières chroniques de l’histoire des Francs, au VIIIe siècle de notre ère, jusqu’à la Révolution française de 1789, les monarchies franques puis françaises ont cherché à s’identifier à l’Antiquité et notamment à l’Antiquité classique. Tout au long du Moyen Âge et de l’Époque moderne, des domaines aussi variés qu’essentiels, tels que l’histoire des origines, la politique, la culture, l’idéologie et l’éducation sous la monarchie française furent profondément influencés par des modèles antiques. Chercher à comprendre ce phénomène revient ainsi à se demander dans quelle mesure l’Antiquité influença une monarchie française, aussi bien à ses balbutiements sous les Francs que mille ans plus tard sous Louis XIV, le roi Soleil. En effet, c’est dans cette Antiquité que ce régime chercha ses origines, puisa un savoir et une culture qui allaient devenir la base de l’éducation des princes du royaume ainsi que de l’iconographie monarchique de l’Époque moderne. Dans cette communication, nous examinerons ces trois phénomènes — la question des origines, l’éducation princière et l’iconographie monarchique — dans le but de déterminer à quel point des liens infrangibles rattachent la monarchie française à l’Antiquité.
Le personnage de Sappho : de la controverse au cœur d’une identité sexuelle
Par Catherine Labelle-Léonard, étudiante au baccalauréat en enseignement secondaire, profil développement personnel, 1re année
C’est au milieu du XIXe siècle que le terme « lesbienne » fait son apparition dans la littérature pour désigner des relations sexuelles entre femmes. L’étymologie du mot « lesbienne » fait référence à l’île de Lesbos, cette île grecque du nord-est de la mer Égée, près des côtes de la Turquie. Pourquoi le nom de cette île est-il à l’origine de ce mot ? En fait, Lesbos est la mère patrie de Sappho, une poétesse de la Grèce antique racontant l’amour entre femmes durant la période archaïque. Au fil du temps, plusieurs femmes homosexuelles se sont approprié la figure de Sappho, la considérant comme une précurseure de leur identité sexuelle. Mais qui est Sappho et comment son histoire se rattache-t-elle au lesbianisme ? Au fil des recherches, on constate que l’histoire de la vie de Sappho fait l’objet de nombreuses controverses chez les historiens. D’une époque à l’autre et d’un historien à l’autre, on retrouve plusieurs versions de son histoire, tantôt contradictoires, tantôt complémentaires, mais très rarement identiques. Dans la première partie de la présentation, nous ferons le point sur les connaissances entourant la vie de la poétesse. Nous aborderons, en deuxième partie, le processus de récupération de la figure de Sappho par des femmes homosexuelles dans le domaine de la littérature, du tourisme et des médias. Le but de l’exposé est de montrer que, malgré certaines divergences, Sappho joue un rôle clé en tant que symbole de l’agentivité des femmes lesbiennes depuis le XIXe siècle.
Le discours religieux et la sexualité féminine au Québec, 1920–1960
Par Karen Beaulieu, candidate à la maîtrise en histoire
La sexualité féminine a de tout temps été sujette à prescription normative. Au Québec, le clergé a joué un rôle particulièrement actif dans ce domaine. Notre objectif ici est de tracer un portrait détaillé des discours normatifs provenant de l’Église à propos de la sexualité féminine entre les années 1920 et 1960 et d’en retracer les origines. Pour y arriver, nous utiliserons des sources primaires, tels des manuels de sexualité maritale et des tracts publiés par l’École Sociale populaire. Nous souhaitons cerner les frontières de ce qui était défini comme la norme à respecter en matière de sexualité féminine par les élites religieuses influentes au Québec à cette époque.
Les élites religieuses s’immisçaient dans tous les aspects sociaux de la vie des Canadiens français et s’arrogeaient le pouvoir de déterminer l’acceptabilité sociale de certains comportements, y compris ceux touchant la vie intime. Quels aspects de la vie personnelle et sexuelle des femmes ont fait l’objet de prescriptions normatives des élites religieuses? Et surtout, de quelle manière et dans quelle mesure ces prescriptions ont-elles pu avoir un impact sur les principales concernées? Pour répondre à ces questions, nous nous attarderons à deux facettes du discours du clergé : la pression nataliste exercée sur les femmes et la condamnation de la recherche du plaisir physique.
António de Oliveira Salazar, un cas de dictature unique et méconnu
Par Naomie-Jade Ladry, étudiante au baccalauréat en histoire, 1re année
À la suite d’un attentat contre le roi Carlos 1er, en 1908, le Portugal connaît une période d’anarchie d’une trentaine d’années. En 1926, dans un pays complètement désordonné, plusieurs généraux marchent sur Lisbonne, s’emparent du pouvoir et instaurent une dictature militaire afin de ramener l’ordre au sein de l’État. Une série de dictateurs se succèdent alors, jusqu’à l’arrivée au pouvoir de l’économiste António de Oliveira Salazar, en 1932. Tandis que la plupart des dictatures européennes se terminent après la Deuxième Guerre mondiale, le régime de Salazar parvient à se maintenir pendant encore une quarantaine d’années. Comment expliquer cette longévité exceptionnelle? C’est ce que cette communication tâchera d’éclaircir en analysant différents facteurs, dont le contexte de l’arrivée au pouvoir de Salazar. Dès le départ, l’économiste parvient à imposer ses propres conditions et à mettre sur pied une organisation du pouvoir lui permettant de se maintenir en place pendant une très longue période. Par ailleurs, nous nous attarderons aux politiques économiques mises en œuvre par Salazar, des politiques strictes qui redresseront l’économie portugaise, tout en refermant le pays sur lui-même et en assurant au dictateur un contrôle serré sur les différents ministères. Enfin, le régime de Salazar se distingue des autres dictatures européennes de la même époque par l’appui qu’il trouve auprès des forces de la richesse foncière, de la milice ainsi que de l’Église, qui l’ont porté au pouvoir.
Le ministère de la Propagande : un atout important dans la consolidation du régime hitlérien de 1933 à 1939
Par Sophie Bernier, étudiante au baccalauréat en histoire, 3e année
Sur le continent européen, les années 20 voient émerger l’idéologie fasciste. L’Allemagne, humiliée à la suite de la défaite de la Grande Guerre, n’échappe pas à cette tendance totalitaire. L’arrivée d’Hitler au pouvoir entraîne des changements majeurs au sein de l’État allemand, notamment avec l’instauration de lois antisémites et la mise en place des politiques nazies, qui vont mener à l’extermination massive des Juifs. Mais comment ces aspirations raciales, incarnées par le Führer, ont-elles pu obtenir un appui suffisant au sein de la population pour s’imposer? C’est ici qu’entre en jeu le ministère de la Propagande, créé par Hitler le 11 mars 1933 et dirigé par Joseph Goebbels. Dans un premier temps, nous tenterons de comprendre dans quel contexte est instauré le ministère de la Propagande. Nous analyserons ensuite comment ce ministère est devenu un outil politique important pour le troisième Reich et par quels moyens il a pu susciter l’adhésion d’un nombre aussi important d’Allemands et d’Allemandes.
La bataille de Midway : une réinterprétation de la victoire américaine
Par Pierre-Olivier Lemieux, candidat à la maîtrise
La bataille de Midway, survenue dans le Pacifique, est l’une des plus importantes batailles navales de la Seconde Guerre mondiale. Entre le 4 et le 7 juin 1942, seulement six mois après l’attaque du Japon sur Pearl Harbor, la Marine américaine, sous le commandement des amiraux Nimitz, Fletcher, et Spruance, réussit à repousser une attaque de la Marine impériale japonaise, commandée par les amiraux Yamamoto et Nagumo. Cette victoire américaine est considérée comme l’un des moments décisifs du conflit américano-japonais. En effet, au terme de cet affrontement, les rapports de force dans le Pacifique s’inversent entre les deux belligérants, au bénéfice des États-Unis.
La bataille de Midway est un évènement mythique dans la mémoire collective américaine. Ce triomphe a souvent été qualifié de « miracle » ou de « victoire incroyable ». Une telle conception résulte du fait que l’évènement s’est déroulé à un moment où la population américaine avait grandement besoin de bonnes nouvelles. Dans le but de ne pas ternir une grande victoire et de protéger la carrière de certains officiers, quelques éléments moins glorieux de l’affrontement ont intentionnellement été gardés dans l’ombre. Au cours de la dernière décennie, toutefois, une nouvelle génération d’historiens a contribué au renouvèlement des connaissances liées à cet évènement. Un survol de cette nouvelle historiographie permettra d’apporter une meilleure compréhension de ce moment décisif de la Seconde Guerre mondiale. Sans rien enlever à l’importance historique de Midway, l’historiographie récente permet de mieux saisir comment une bataille qui n’a duré que trois jours a pu faire basculer aussi radicalement le cours de l’histoire.
La place de l’histoire dans les jeux vidéo
Par Jonathan Vallée, candidat à la maîtrise
Les plates-formes de diffusion de l’histoire vont bien au-delà de la parution de monographies, d’articles ou de la présentation de communications scientifiques. Bien que les véhicules de la culture populaire ne soient pas toujours prisés par la communauté historienne, ils représentent néanmoins un tremplin important vers l’histoire. Dans cette veine, le jeu vidéo, au même titre que le cinéma, la télévision et la littérature, ouvre une fenêtre sur le passé avec la multiplication des jeux à référent historique.
Objet d’étude à part entière, ce type de jeu vidéo permet de réfléchir simultanément à deux concepts liés à la place de l’histoire dans un contexte ludique : l’authenticité et le réalisme. L’authenticité peut être définie comme le souci des créateurs de ne pas s’écarter de la « vérité » historique dans la narration et le scénario des jeux. Interactif et animé, ce médium permet ainsi de mettre en scène des faits et des évènements qui, jusqu’ici, sont immobiles sur le papier et les photographies. Le réalisme se traduit quant à lui par la possibilité de reconstituer des environnements et de recréer des personnages historiques avec un souci du détail. Ce faisant, comment le jeu vidéo concilie-t-il ces deux approches potentiellement incompatibles?
Nous verrons que, dans certains cas, l’amélioration du réalisme, par l’architecture et le savoir technique, peut se faire au détriment de l’authenticité historique. Dans d’autres cas, néanmoins, nous démontrerons qu’il est possible que réalisme et authenticité marchent de pair. Les jeux ainsi réalisés peuvent alors être utilisés comme moyen pédagogique permettant de réfléchir à l’intégration de l’histoire au divertissement.
Le particularisme du Madawaska : la réalité identitaire d’une région frontalière
Par Alyson Blaquière, étudiante au baccalauréat en histoire, 2e année
Le Madawaska, une région située à la croisée des frontières du Québec, du Nouveau-Brunswick et du Maine, constitue une entité territoriale aux contours assez flous, aux prises avec des enjeux identitaires et culturels qui lui sont propres. Avec une population d’origines diverses, la question identitaire dans cette région se révèle particulièrement délicate, étant donné la multitude de référents culturels qui colorent l’environnement quotidien des communautés locales. Certes, on peut d’abord être porté à percevoir le Madawaska comme une simple terre d’accueil pour les réfugiés acadiens, mais en se penchant sur le peuplement de cette région, force est de constater que la population actuelle n’est pas simplement composée de descendants d’Acadiens. Au fil du temps, c’est une population unique qui s’est enracinée au Madawaska. Ni exclusivement acadienne, ni purement québécoise, néobrunswickoise ou mainoise, cette population s’est construit une culture singulière à partir de l’héritage de ses nombreuses constituantes et des cultures environnantes. Dans ce contexte, comment se manifeste le processus de construction identitaire de la communauté du Madawaska?
Le matériel lithique de l’île Saint-Barnabé
Par Guy-Pascal Weiner, étudiant au baccalauréat en enseignement secondaire, profil univers social, 3e année
Depuis cinq ans, les travaux archéologiques sur l’île Saint-Barnabé ont permis de découvrir de nombreux artéfacts lithiques, témoins d’une occupation amérindienne préhistorique. À ce jour, cette collection comporte un peu plus de 400 artéfacts. Une analyse de ce matériel a été réalisée au cours de l’été 2014 dans le but d’identifier la place et la vocation de l’île Saint-Barnabé dans la chaine opératoire de confection de l’outillage lithique. En lien avec cet objectif général, il s’agissait également de répertorier les stigmates des éclats de taille afin d’identifier les techniques utilisées dans la fabrication d’outils. Dans cette communication, nous présenterons les résultats de ces enquêtes et essaierons d’établir des liens entre les sources potentielles des artéfacts et la vocation de l’île Saint-Barnabé dans le cycle de vie autochtone. Des hypothèses seront par la suite formulées pour tenter d’expliquer les liens unissant le matériel lithique (les outils de pierre mis au jour) et le matériel zooarchéologique (les restes d’animaux notamment) retrouvés sur l’île.
Le calvinisme : une prémisse au monde moderne
Par Cassandre Roy-Drainville
Si les Réformes du XVIe siècle ont tant marqué, c’est parce qu’elles sont à la base du monde contemporain. Au Moyen Âge, les frontières entre les pouvoirs temporel et religieux ne sont pas étanches ; des laïcs participent à la vie de l’Église alors que des religieux interviennent dans les affaires de l’État. Cette situation conduit à des abus, notamment avec le phénomène des Indulgences qui permet de se faire pardonner ses péchés en échange d’un peu d’argent. Martin Luther est l’un des instigateurs du combat contre ce genre de manifestations. Plusieurs ont suivi sa trace. L’un d’entre eux, Jean Calvin (ou Cauvin), fut très important. Sa doctrine se répandit un peu partout en Europe, de même qu’en Amérique du Nord. Les idées dont il se fit le promoteur furent innovantes sur bien des points et, en rétrospective, plusieurs historiens se sont demandé si elles ont pu être à l’origine du capitalisme. Même si ce n’était pas l’intention de Calvin, l’idéal protestant qu’il formula se répandit chez les croyants et fut interprété par certains de façon telle qu’il leur permit de cheminer vers la recherche de profit. De quelle façon Calvin s’inscrit-il dans le monde moderne et quelles sont les limites de son influence? C’est à ces questions que je tenterai de répondre dans le cadre de cette communication.
Les revendications autochtones : entre jurisprudence et histoire
Par Eve Marie Roy
Depuis la promulgation de la Proclamation royale en 1763, la question autochtone s’est judiciarisée. Alors que plusieurs lois ont tenté de catégoriser les Autochtones, pensons notamment à la Loi sur les Indiens de 1867, d’autres dossiers de revendications, notamment territoriales, ont mobilisé les tribunaux de différentes instances. Parallèlement à cela, l’histoire autochtone s’est imposée comme un champ de recherche prolifique au cours des dernières années. Force est de constater qu’il ne suffit pas de s’intéresser à l’histoire de la condition autochtone pour que les problèmes qu’elle soulève se règlent… Le mouvement Idle No More nous le rappelle avec force. De nombreux projets de loi et traités continuent d’occuper les plus hauts tribunaux du pays. Et les historiens y sont régulièrement conviés à titre «d’experts». Dans cette communication, nous voulons examiner les interactions qui existent entre la pratique historienne et la jurisprudence. D’une part, nous nous demanderons quel a été le rôle de l’histoire et des historiens dans le règlement des revendications autochtones. D’autre part, nous verrons dans quelle mesure la jurisprudence influence les historiens dans leur manière de faire l’histoire autochtone.
Hermaphrodite Clio ? Réflexion historiographique des femmes, du genre et de la masculinité au Québec moderne
Par Jonathan Vallée
L’histoire québécoise des dernières décennies s’est démarquée par une prise en compte constante de nouvelles réalités historiques. Certains qualifient ce mouvement d’éclatement de l’histoire et dénoncent cette nouvelle histoire en miettes, d’autres préfèrent référer au terme d’intégration. L’histoire des femmes s’avère être un exemple parfait pour saisir cette tendance historiographique. Depuis les années 1970, l’histoire des femmes s’est affirmée comme un champ historiographique dynamique. Au cours des années 1980, et surtout durant la décennie suivante, l’histoire du genre est venue compléter, voire supplanter, l’histoire des femmes. Au coeur même du concept de genre se trouve l’idée qu’être une femme – ou un homme – est un construit social et non une réalité innée. La porte était dorénavant ouverte pour développer un nouveau champ d’études : celui de la masculinité. Où en sommes-nous maintenant dans ce mouvement? Les historiographies des femmes, du genre et de la masculinité représentent-elles des exemples d’intégration ou d’éclatement du champ historique? La présente communication se veut un survol et un bilan critique de ces historiographies afin de bien cerner la tendance qui court au Québec.
Exploration patrimoniale à Gesgapegiag
Par Marie-Eve Morissette
Le patrimoine est un concept culturel. La compréhension du patrimoine, notamment de ce qu’il signifie et de ce qu’il doit générer, contient évidemment des limites propres à la culture de ceux qui s’en réclament – c’est-à-dire occidentale, aux racines européennes. Ces balises posées, nous avons tenté de jauger les limites opérationnelles du concept de patrimoine dans la communauté autochtone de Gesgapegiag, qui présente un parcours historique singulier. Le concept de patrimoine peut-il transcender les cultures occidentales et autochtones? Nous conduirons notre analyse à partir d’une série d’enquêtes de terrain menées à Gesgapegiag, en mettant à contribution les notions intrinsèques au concept de patrimoine, c’est-à-dire le temps, l’espace et le rapport à l’Autre. À terme, cette exploration nous permettra plus largement de réfléchir à la mémoire, à l’identité et à la culture des communautés autochtones.
Un processus de patrimonialisation inachevé : le cas de la maison René-Lévesque
Par Simon Bélanger
Il n’y a de doute dans l’esprit de personne : René Lévesque fut un personnage marquant de l’histoire du Québec. Vénéré, presque déifié par plusieurs, détesté par d’autres, il a laissé son empreinte sur la société québécoise telle qu’on la connaît aujourd’hui. Pourtant, sa maison d’enfance, située à New Carlisle en Gaspésie, est aujourd’hui dans un état déplorable, qui est loin d’indiquer qu’une des figures politiques les plus importantes du Québec (et même du Canada) y a déjà résidé. Depuis sa mort en 1987, plusieurs projets pour mettre cette maison en valeur ont vu le jour, mais la question n’est toujours pas réglée en 2014. De quelle façon le processus de patrimonialisation de la maison d’enfance de René Lévesque a-t-il pu se transformer en crise patrimoniale au cours des 25 dernières années ? Nous retracerons d’abord l’évolution de la maison, depuis la mort du premier ministre jusqu’à aujourd’hui. Nous nous pencherons ensuite sur le rôle joué par les différents acteurs de cette controverse, en mobilisant notamment les articles parus entre 1987 et 2013 dans le Gaspé Spec, un journal anglophone publié à New Carlisle. Au terme du parcours, nous pouvons nous demander jusqu’à quel point l’objet lui-même ne devient pas accessoire dans cette joute autour d’un espace hautement symbolique.
Saint-Louis-de-Gonzague : une mémoire au-delà de la fermeture
Par William Chassé et André-Pierre Vignola
Le Bureau d’aménagement de l’Est du Québec (BAEQ) occupe une place importante dans la mémoire collective régionale. Initiative de restructuration de l’espace socio-économique sans précédent en Amérique du Nord, elle représente à la fois une rupture dans la manière d’occuper le territoire et une rupture sociale pour les populations touchées par les entreprises de relocalisation. Nous avons été confrontés à cette réalité en visitant le village fermé de Saint-Louis-de-Gonzague, dans la Baie-des-Chaleurs. Comment construit-on une mémoire des lieux lorsque ceux-ci subissent d’aussi profondes transformations? Et comment perpétue-t-on cette mémoire au fil des années? Nous tenterons d’élaborer quelques pistes de réflexion à partir d’observations effectuées l’été dernier sur les formes de commémoration individuelles et collectives associées au site du village disparu.
Considérations sur la patrimonialisation du paysage : le cas du Corps-Mort
Par Jean Bélanger
En marge des traditionnelles batailles pour la sauvegarde du patrimoine bâti, la notion de patrimoine elle-même s’est passablement élargie au cours des dernières décennies. À la lumière des nouvelles dispositions sur la patrimonialisation des paysages contenues dans la Loi sur le patrimoine culturel, nous proposons ici d’examiner le cas spécifique du paysage du Corps-Mort, un rocher isolé au large des Îles-de-la- Madeleine. Quelle est la pertinence du Corps-Mort en tant qu’objet patrimonial, et de quelle manière la notion nouvelle de patrimoine paysager pourrait-elle permettre d’inscrire sa patrimonialisation à l’intérieur d’un cadre opérationnel? Notre analyse sera notamment conduite à partir des représentations de cet objet de mémoire au sein de la littérature historique ainsi que chez les Madelinots eux-mêmes. Notre étude de cas nous amènera à discuter des diverses difficultés que soulève la réflexion sur la patrimonialisation des paysages.
Les amas de pierres au Québec : préhistoriques ou historiques ?
Par Emilie Young-Vigneault
La pierre étant un matériau inorganique, elle est souvent le seul indice qui subsiste d’une activité humaine. Au Québec, plusieurs amas ou monticules de pierres vraisemblablement d’origine anthropique ont été identifiés et ils semblent trop structurés pour être de simples tas d’épierrement de champs. Ces amas, qui présentent des formes trapézoïdales, ovoïdes et en dôme, se comptent parfois par centaines sur des territoires boisés de moins d’un kilomètre carré. Bien souvent, aucun artefact ou trace culturelle ne permet de leur attribuer une fonction. Ainsi, on leur associe souvent des légendes originales ; il arrive également qu’on les interprète d’emblée, sans analyses préalables, comme des sépultures amérindiennes ou des structures alignées sur des objets astronomiques. À Saint-Fabien, la mise au jour d’un site inédit contenant plusieurs de ces structures nous offre les conditions idéales pour concevoir et tester une méthodologie et un cadre interprétatif pour ce champ d’étude.
La patrimonialisation du mont Saint-Joseph : l’envers du décor
Par Guy-Pascal Weiner
La dernière mouture de la loi sur le patrimoine culturel autorise la patrimonialisation des paysages. Or, cette nouvelle facette du patrimoine suscite plusieurs questions quant à son application, notamment dans la mesure où les initiatives de protection doivent émaner des communautés. Dans la municipalité de Carleton-sur-Mer située dans la Baie-des-Chaleurs, la protection du mont Saint-Joseph et de son environnement soulève des questions très concrètes : quels traits paysagers ou attributs du territoire les citoyens sont-ils prêts à protéger, à modifier ou à éliminer dans un processus de patrimonialisation, et au nom de quelles valeurs patrimoniales? Nous avons choisi de sonder des habitants de Carleton-sur-Mer sur ces questions à l’aide d’une photographie prise du sommet du mont Saint-Joseph, en faisant intervenir différentes perturbations qui seraient le fruit d’éventuels plans de mise en valeur. Nous vous présentons ici les résultats de cette enquête de terrain.
Quelle histoire pour quelle mémoire ? Les débats sur l’enseignement de l’Histoire et la réforme de l’éducation des années 1960.
Par Jean Bélanger ~ Prix des professeurs
La Réforme de l’éducation menée au Québec au cours des années 1960 constitue le socle du système scolaire actuel. Tous les aspects du réseau d’enseignement sont alors abordés et les membres de la Commission Parent ne manquent pas de se pencher sur l’enseignement de l’histoire. De quelle manière les vieux débats sur l’histoire nationale se déploient et évoluent-ils alors? Quels enjeux mobilisent ceux qui réfléchissent sur l’avenir de l’histoire à l’école? Qui sont les principaux acteurs qui tentent de l’infléchir? Je tenterai de répondre à ces questions en recomposant les débats qui ont eu cours à partir des traces écrites laissées dans différents rapports gouvernementaux, journaux et périodiques. Dans le contexte de remodelage des disciplines et de réorganisation du système éducatif, les enjeux qui dominent les débats sur l’enseignement de l’histoire à l’école secondaire québécoise seront ainsi mis en perspective.
Les doubles oubliées : les femmes amérindiennes dans l’historiographie
Par Camille Delabarre
L’histoire des femmes est en pleine expansion au Québec depuis les années soixante-‐dix, comme nous le prouvent la publication de la synthèse du Collectif Clio et celle, toute récente, de Denyse Baillargeon. En parallèle, l’histoire des Amérindiens se développe et donne lieu à diverses publications. Pourtant, il suffit d’ouvrir l’un ou l’autre de ces ouvrages pour s’apercevoir que les Amérindiennes en sont les grandes absentes et que très peu d’informations sont disponibles à leur sujet, notamment pour la période de la Nouvelle-‐ France. En nous basant sur des travaux phares de l’histoire des femmes et de l’histoire des Amérindiens et en croisant ces deux historiographies, nous démontrerons que les femmes autochtones ont effectivement été négligées dans l’histoire québécoise. Nous tenterons par la suite d’expliquer ce phénomène et nous proposerons des pistes de recherche qui permettraient de mettre en lumière l’histoire de ces femmes.
La dissolution du pouvoir chamanique dans l’Amérique coloniale : assimilation européenne ou évolution de la culture amérindienne
Par David Vincent-Auger
L’historiographie traitant du recul du pouvoir chamanique chez les Iroquoïens a été, au fils des dernières années, tributaire d’une vision européocentriste. Elle a largement attribué ce recul à un processus d’assimilation des populations autochtones dicté par les missionnaires jésuites de la Nouvelle‐France. Nous croyons que cette approche ne peut à elle seule expliquer la perte d’influence et de pouvoir des chamans au sein de leur communauté. L’examen des sources primaires mises en œuvre dans cette historiographie nous conduit à isoler des facteurs mettant en cause la société amérindienne elle‐même.
Rationaliser l’espace et le temps à l’époque de la Révolution française
Par Clovis Roussy
Inspirés par les idées novatrices qui circulaient au XVIIIe siècle, les penseurs de la Révolution française ont trouvé, dans la malléabilité d’une société débarrassée de ses institutions, le terrain idéal pour donner forme aux idées des Lumières. Outre les réformes politiques et sociales qui lui donnent corps, la Révolution française a également donné lieu à d’importantes réformes culturelles, intellectuelles et scientifiques, dont l’un des objectifs était de conformer l’existence humaine aux exigences de la raison et de l’ordre naturel. Deux réalisations scientifiques et culturelles de cette période sont emblématiques de cette double volonté: le calendrier républicain visant à rationaliser le temps et le système métrique cherchant à rationaliser l’espace. Dans cette présentation, nous verrons en quoi ces projets révolutionnaires participent d’une même idéologie et constituent de purs produits du Siècle des Lumières.
Refaire l’Italie, de la gauche vers la droite. Le parcours de Benito Mussolini
Par Jonathan Vallée
Au lendemain de la Grande Guerre, plusieurs pays occidentaux reliés de près ou de loin à ces événements traversent d’importants changements. C’est le cas de l’Italie, tantôt Alliée, tantôt membre de l’Entente dans cette guerre. Fortement influencée par les nationalismes du dernier siècle, elle mobilise tous les moyens à sa disposition afin de retrouver sa fierté perdue. Considérant avoir été lésée au moment de la signature du Traité de Versailles, n’ayant pu obtenir de nouveaux territoires malgré ses visées colonisatrices, l’Italie connait alors un regain de ferveur nationaliste. Le parcours de Benito Mussolini est intimement lié au destin de la nation italienne. Il participe activement à ce renouveau nationaliste en mettant en oeuvre plusieurs stratagèmes politiques et sociaux, allant du chantage à la violence. Il est par ailleurs un des premiers à prendre le pari du totalitarisme, ce qui peut surprendre lorsque l’on sait qu’il était dans sa jeunesse un militant socialiste. Comment expliquer un tournant idéologique aussi radical? C’est en examinant à la fois le parcours individuel de Benito Mussolini et le contexte social et politique dans lequel il a évolué que je tenterai de répondre à cette question.
Le Bureau d’aménagement de l’Est-du-Québec (B.A.E.Q.) et l’animation locale : bilan des travaux et pistes de recherche
Par Philippe Daigle
Il y a maintenant cinquante ans s’amorçait l’ambitieux projet de restructuration régionale du Bureau d’aménagement de l’Est-du-Québec (B.A.E.Q.). L’histoire retient avant tout du B.A.E.Q. les fermetures de villages et les Opérations Dignité. Ces images ont tendance à occulter le projet dans son ensemble, qui constituent une expérience sans précédent au Québec en matière d’aménagement du territoire et d’enquête participative. La formation des comités locaux, étape décisive du processus de consultation des communautés interpelées par l’opération, représente l’une des clés de voûte du B.A.E.Q. Les observateurs ayant jusqu’à présent attribué l’échec du B.A.E.Q. au déraillement de la démarche participative, il importe de scruter plus avant le fonctionnement de ces comités. Prenant appui sur les récents travaux d’une équipe de recherche sur l’expérience du B.A.E.Q., nous proposons ici de faire état du bilan historiographique des études réalisées sur les comités et l’animation locale. Quelques pistes de recherche à explorer seront ensuite suggérées.
La communauté anglophone de Metis-sur-Mer : une minorité dans une majorité dans une minorité
Par Joannie Rousseau-Plante et Jessie Morin ~ Prix du public
En dehors de Montréal et des Cantons-de-l’Est, peu de travaux ont été produits sur les communautés anglophones régionales. La communauté de Metis-sur-Mer ne fait pas exception. La riche histoire de cette localité et sa vocation touristique l’ont amenée, au fil des années, à se rappeler à la mémoire régionale. Nous avons pour notre part choisi de porter un regard sur cette communauté à l’aide du concept de patrimoine immatériel, afin d’en dégager un bagage culturel spécifique et de statuer sur la pertinence de sa mise en valeur. Prenant appui sur une série enquêtes orales, notre démarche a rapidement débouché sur de nouvelles perspectives, où les notions de culture et d’identité se sont invitées. En bout de compte, ce projet nous aura permis de jauger les limites opératoires du concept de patrimoine immatériel.
Le cimetière de Sainte-Anne-de-la-Pointe-au-Père : lecture à travers le patrimoine funéraire
Par Cindy Canuel, François Lafond et Myriam Lamoureux
Largement négligé en recherche patrimoniale, le cimetière est un espace fascinant où se côtoient des éléments architecturaux, des ensembles d’aménagement et des objets religieux intimement liés à un contexte local. D’une certaine façon, le cimetière est le miroir de sa communauté, puisqu’il reflète son évolution et ses croyances. À partir d’une étude de cas menée sur le cimetière de Sainte-Anne‐de‐la‐Pointe-au-Père, nous proposons de porter un regard différent sur cet espace trop souvent oublié, en utilisant le concept de patrimoine funéraire. Ce faisant, nous espérons démontrer que le milieu des morts entretient des liens étroits avec le milieu des vivants et fournit ainsi de précieuses informations sur la culture locale, utiles à la connaissance historique et à la recherche en patrimoine.
L’Ile-Saint-Barnabé à l’école : projet de trousse archéologique
Par Marc‐Anthony Barriault et Isabelle Francoeur
Ces dernières années, la publicité conçue par Tourisme Rimouski autour de l’île Saint‐Barnabé a participé à cristalliser la Nouvelle‐France et le légendaire ermite comme représentations dominantes associées à cet espace. Les campagnes de fouilles archéologiques entreprises depuis quelques années sur l’île ont toutefois révélé des artefacts pouvant faire état de plusieurs périodes d’occupation de ce territoire. Ces résultats nous ont conduits à réfléchir à la pertinence d’un projet de mise en valeur pédagogique du patrimoine archéologique pour les écoles secondaires. Prenant appui sur la trousse archéologique d’Archeo‐Québec, nous avons imaginé un outil pédagogique à saveur régionale à partir du produit des différentes fouilles. Nous présenterons les composantes de cette trousse archéologique, en lien avec la trame historique de l’île et les principaux objectifs du programme d’univers social du secondaire.
Julien l’Apostat et la population d’Antioche de Syrie au IVe siècle
par Pierre-Olivier Gagnon ~ Prix du public
À l’automne de l’an 362 de notre ère, l’empereur Julien quitte la cité d’Antioche pour guerroyer contre les Perses. Dans un discours intitulé l’Ennemi des barbes, Julien ressasse avec amertume les sept mois passés dans l’ancienne métropole hellénistique. Le sarcasme de l’empereur jette un voile sur les raisons de l’animosité de la population d’Antioche à son égard. Quelles motivations se cachent derrière l’ingratitude et l’impiété dont il accuse la métropole? Pour répondre à cette question, il faut revisiter certaines des observations de l’empereur et remettre dans leur contexte historique les attitudes populaires: celui où se côtoient les crises alimentaires, la montée du christianisme et la reprise des hostilités contre les Perses.
Inquisition et répression de l’hérésie au Moyen Âge classique
par Clovis Roussy
Au XIe siècle, l’Église entreprend, par la réforme grégorienne, de consolider son autorité sur les sociétés européennes. C’est dans ce contexte que les réformateurs se heurtent au développement de plusieurs mouvements hérétiques qui contestent les positions officielles de l’Église. Les mesures de répression prises à leur encontre donneront lieu à l’institution du tribunal de l’Inquisition. Le développement de l’hérésie ayant connu son apogée au XIIe siècle, il apparaît que la réforme de l’autorité religieuse, qui lui est antérieure, ne s’est pas faite en réaction aux dissidences. Au contraire, il semble que ce soit le nouveau climat d’intransigeance et d’intolérance doctrinale qui ait, sinon suscité, du moins permis d’identifier comme tels les mouvements hérétiques. L’apparition et la répression de l’hérésie peuvent donc être présentées comme deux manifestations parallèles du processus plus général de consolidation et de centralisation du pouvoir de l’Église à cette époque.
Le meurtre des aliénés dans l’Allemagne nazie
par Katherine Yockell
On estime qu’environ 200 000 à 235 000 handicapés mentaux ont été exécutés en Allemagne par le régime nazi. Une organisation secrète, l’Aktion T4, a été mise sur pied à cette seule fin et a mis à mort plus de 70 000 personnes dans des centres spéciaux entre 1939 et 1941. À quelles conceptions faisait appel ce crime méconnu? À quelles finalités répondait-il et comment ce projet a-t-il pu être réalisé? Pour rendre compte du sort des aliénés mentaux dans l’Allemagne nazie, il est nécessaire d’examiner comment ils étaient représentés dans l’idéologie nazie, quel problème posait leur existence et en quoi leur extermination s’inscrivait dans le programme du régime. Dans un deuxième temps, il faut voir par quels moyens ce projet radical a pu être mené et se traduire en mesures concrètes, notamment par la mise sur pied de l’Aktion T4.
La modernité du modèle familial québécois: un héritage de la Révolution tranquille?
par André-Pierre Vignola
Dans l’imaginaire collectif, l’association est systématique entre l’avènement de la société québécoise moderne et la série de réformes lancée par le parti de Jean Lesage dans les années 1960. Cette seule étincelle de la Révolution tranquille suffit-elle à expliquer les changements fondamentaux observés depuis la Deuxième Guerre mondiale? Dans quelle mesure le renouveau économique d’après-guerre a-t-il pu contribuer à amorcer les changements culturels profonds qui s’annonçaient dans la culture familiale québécoise? Nous tenterons d’éclairer ces questions en portant une attention particulière à l’évolution du modèle familial québécois, à la transformation des habitudes de consommation domestique et au maintien des valeurs traditionnelles.
L’occupation préhistorique au sud de l’estuaire laurentien
par Louis-Étienne Fréchette-Gagné
Le sud de l’estuaire du Saint-Laurent est traditionnellement tenu pour le territoire ancestral de la nation malécite. D’après les écrits des premiers Européens et la tradition autochtone, les Malécites étaient présents dans la région à l’époque des premiers contacts. Les témoins archéologiques permettent de faire remonter cette présence jusqu’à environ 1000 ans avant aujourd’hui. Or, si l’archéologie et l’histoire paléoenvironnementale témoignent d’une occupation du territoire depuis au moins 9000 ans, les vestiges des huit premiers millénaires ne peuvent être associés avec certitude à aucune culture actuelle. Entre occupation et abandon, jusqu’à quel point est-il possible de reconstituer l’histoire du peuplement de la région? Faut-il nuancer le caractère ancestral de son occupation actuelle?
L’inhumation sous les églises de l’Est-du-Québec. Autopsie d’une pratique funéraire disparue
par Mathieu Arsenault ~ Prix des professeurs
Du poète latin Claudius à Madame de Sévigné, nombreux sont ceux qui ont proclamé l’égalité des Hommes devant la mort. Dernier moment de la vie, celle-ci semble en effet niveler toutes les conditions, laissant le riche comme le pauvre complètement démunis face à sa mortalité. La pratique de l’inhumation sous les églises nous rappelle toutefois que les disparités persistent au-delà du dernier repos, un secret dont nos lieux de culte conservent un souvenir aussi pieux que discret. À travers les registres paroissiaux de L’Isle-Verte, de Rimouski, de Sainte-Luce et de Bonaventure, nous proposons un regard sur cette pratique millénaire, en tant que rituel spirituel et social dans l’Est-du-Québec. Ce survol nous permettra de voir qu’entre les cérémonies conduisant aux fosses des cimetières et le faste des offices accompagnant le défunt dans la crypte du temple, nos ancêtres n’étaient pas tous égaux devant la mort.
Le patrimoine littéraire: étude du cas de la Maison Louis-Bertrand
par Marie-Pier Tremblay Dextras
Les collections de livres anciens, en tant qu’objets patrimoniaux matériels et immatériels, apparaissent comme de formidables objets pour écrire l’histoire littéraire. Leur inventaire analytique permet notamment de jauger leur cheminement, leur importance sociologique, la dynamique entre les institutions et la culture populaire, ainsi que l’évolution de l’imprimerie et des pratiques de lecture. La Maison Louis-Bertrand contient des volumes qui nous renseignent en premier lieu sur son histoire, mais qui peuvent également être utiles pour enquêter sur le rôle de la famille Bertrand à l’échelle communautaire et sur l’histoire des idées en général. Elle pourrait être l’objet d’enquêtes semblables à celle que le projet IMAQ mène actuellement au Centre Joseph-Charles Taché de l’UQAR. En somme, cette collection permettrait de vérifier in situ si les conjectures de l’histoire de la littérature au Canada français trouvent des correspondances concrètes dans un monument patrimonial.
Pierre et colombage: l’archéologie au service du patrimoine bâti
par François Lafond
Le site historique de la Maison Lamontagne, situé à Rimouski-Est, est l’une des rares maisons en colombage pierroté qui subsistent de nos jours au Québec. Depuis sa découverte officielle dans les années 1970 et motivé par l’intérêt porté à ce monument par la population rimouskoise, le ministère des Affaires culturelles a mené trois interventions archéologiques en 1980, 1981 et 1983 pour en apprendre plus sur son histoire. La maison est aujourd’hui un musée et un centre d’interprétation de l’architecture domestique au Québec et les connaissances acquises sur ce site historique sont assez vastes. Nous verrons comment l’archéologie a contribué à notre connaissance de cette maison rurale de la Nouvelle-France.
Le four à chaux de Saint-Anaclet: histoire, mémoire et projets de patrimonialisation
par Eve Marie Roy
Les récentes fouilles archéologiques au four à chaux de Saint-Anaclet ont ravivé son intérêt dans le milieu régional. Motivés par cet intérêt, différents projets de mise en valeur sont envisagés pour le site. Mais que connaît-on vraiment de l’histoire du four? Quelle est sa signification dans la mémoire actuelle de la communauté de Saint-Anaclet? Quel est l’intérêt de patrimonialiser ce site et quels sont les écueils à éviter? Nous retraçons d’abord l’histoire du site et des pratiques qui lui sont associées, puis évoquerons la construction d’une mémoire associée à ce four à chaux, pour enfin réfléchir sur les processus de patrimonialisation le concernant.
Donner sens à l’objet: réflexions autour de la Grande octogonale de Saint-Fabien
par Jessica Laguë ~ Prix du public
Au Québec, de multiples démarches de patrimonialisation se sont mises en branle ces dernières années, produisant dans leurs sillons des résultats inégaux. Parmi les défis s’en profile un qui semble, au premier abord, tenir du paradoxe: maintenir un lien tangible entre un héritage du passé et la communauté qui l’héberge au présent. Dans quelle mesure la Grange octogonale de Saint-Fabien, classée monument historique en 2006, parvient-elle à entretenir ce lien? La question s’est posée à l’occasion d’une réflexion sur le renouvellement de l’offre aux visiteurs pour la prochaine saison touristique. Cette communication sera l’occasion de faire état de pans de l’histoire nationale, régionale et locale qui contribuent à donner un sens à la Grange et de questionner la nature de la relation de la communauté à son endroit.
Hannibal, l’homme qui faillit détruire Rome
par Mathieu Robichaud
À la fin du IIIe siècle avant J.-C., un homme a juré de détruire Rome. Cet homme, Hannibal Barca, est le génie militaire carthaginois de la deuxième guerre punique. Il a mené son armée à travers les Pyrénées et les Alpes pour porter la guerre en Italie, où il a remporté quatre grandes victoires sur les légions romaines. Pourtant, malgré son talent militaire, son armée efficace et ses tactiques audacieuses, il a contourné Rome sans l’attaquer. Pourquoi cet excellent tacticien n’a-t-il pu détruire Rome alors qu’il semblait posséder de nombreux avantages sur les armées romaines?
La bataille de Lépante, début du déclin ottoman?
par Jean Lou Castonguay ~ Prix du public
29 octobre 1571. L’empereur Philippe II apprend une nouvelle avec soulagement : la flotte de la Sainte-Ligue a remporté une grande victoire sur la flotte ottomane à Lépante. Les cloches des églises sonnent la victoire, les artistes s’affairent à immortaliser la victoire chrétienne sur les Turcs, bref, l’heure est à la fête : les jours des Ottomans sont comptés. Mais cette défaite marque-t-elle réellement le commencement d’un long déclin pour les Ottomans? Peut-on attribuer la victoire de Lépante et le déclin ottoman aux progrès techniques et militaires des puissances européennes? Il est possible aujourd’hui de nuancer ces explications traditionnelles.
Le commerce maritime vénitien : au-delà de la soie et des épices
par Rémi Lefrançois
Du Moyen Âge au commencement de l’ère moderne, la République de Venise a été une grande puissance maritime luttant contre la concurrence commerciale et militaire des autres cités italiennes et des royaumes limitrophes. L’enjeu principal de ces luttes restait le contrôle de la Méditerranée et du commerce, garant de la prospérité de nombreux États. Les biens exotiques orientaux, peut-être les objets les plus connus du commerce méditerranéen, cachent un commerce non moins vital pour l’économie vénitienne : celui des matières premières. Nous démontrerons que ce commerce des matières premières a gagné en importance alors que Venise perdait progressivement son monopole sur le commerce des biens exotiques en Méditerranée.
Le fait militaire au Bas-Saint-Laurent
par Louis-Félix Séguin
L’histoire canadienne est peuplée de grands héros de guerre et de mémorables batailles. De Dollard des Ormeaux à Jean Brillant, de Pierre Le Moyne d’Iberville au général Roméo Dallaire, le fait militaire se rappelle régulièrement à notre souvenir à travers différents processus commémoratifs. Ces derniers font état d’une certaine mémoire de faits d’envergure nationale, mais que reste-t-il de cette mémoire militaire dans le cadre régional? Que savons-nous par exemple du parcours militaire de notre propre région du Bas-Saint-Laurent? L’apparente absence en région de faits militaires d’envergure nationale signifie-t-elle l’absence d’une histoire militaire bas-laurentienne? Pour trouver des éléments de réponse, nous vous convions à l’examen du fait militaire dans le Bas-Saint-Laurent depuis l’époque des premiers habitants européens.
Pour en finir avec la crise agricole du XIXe siècle
par Mathieu Arsenault ~ Prix des professeurs
Marquée par l’engouement de plusieurs historiens des années 1940-1970, l’étude de l’agriculture au Bas-Canada a surtout cherché à expliquer la transformation du paysage agricole laurentien entre 1750 et 1850. Observant un déclin de la culture du blé, nettement dominante au XVIIIe siècle et devenue marginale au milieu du XIXe, ces historiens ont cherché à l’expliquer en examinant la dimension culturelle du rapport de l’habitant canadien-français à l’agriculture. Le paradigme d’une crise structurelle de l’agriculture laurentienne traditionnelle s’imposa ainsi dans les études sur le XIXe siècle, jusqu’à ce que cette vision catastrophiste soit ébranlée dans les années 1980. De nouvelles perspectives, animées par des « révisionnistes », vont alors amorcer une transformation de la perception des campagnes canadiennes-françaises, afin d’en finir avec l’idée d’une crise agricole au XIXe siècle.
Chasse aux sorcières et modernité
par Clovis Roussy ~ Prix du public
Alors que l’imaginaire populaire associe couramment la chasse aux sorcières au Moyen Âge et aux tribunaux de l’Inquisition, il semble paradoxal que les persécutions aient majoritairement eu lieu au XVe siècle, au début de l’époque moderne. La vague d’obscurantisme et d’hystérie que constitue la chasse aux sorcières semble en effet irréconciliable avec le renouveau intellectuel et culturel qui caractérise les débuts de la modernité. Pour éclairer cette contradiction, il convient de revenir sur le contexte de la fin du Moyen Âge et de voir comment il a également pu donner lieu à une vague de terreur à l’endroit de la sorcellerie. Entre autres, il nous faut voir comment le processus d’acculturation propre à l’époque moderne a généré une confrontation explosive entre l’Église et une culture paysanne pétrie de superstitions.
L’affaire Goldhagen et la conscience collective allemande
par Pierre-Olivier Gagnon
En 1996, un jeune politologue américain, Daniel Jonah Goldhagen, a relancé l’un des débats les plus houleux de l’historiographie allemande : celui des racines du génocide des Juifs d’Europe. Il proposa une thèse polémique selon laquelle la Shoah ne serait pas l’œuvre d’un individu, mais celle du peuple allemand. Cette théorie, qui reposait sur l’hypothèse d’une sorte de sadisme populaire généralisé, ne semblait pas promise au succès que l’auteur des Bourreaux volontaires de Hitler a pourtant connu en territoire allemand. Comment expliquer cette réception? Que nous révèle-t-elle sur la conscience collective et la mémoire des Allemands d’aujourd’hui?
Les Sex Pistols, une oeuvre situationniste
par Jacob Cossette
Dans les années 1970, l’Angleterre est aux prises avec de profonds problèmes sociaux, politiques et économiques. C’est dans ce contexte qu’apparaissent les Sex Pistols, groupe phare du mouvement punk. Dans le cadre de cette présentation, on montrera comment le groupe se situe dans un courant intellectuel et artistique émanant de Mai ’68, l’Internationale situationniste. Nous verrons comment Malcom McLaren, designer de mode et futur gérant des Sex Pistols, a trouvé une voie d’expression dans ce courant et comment, au retour d’un voyage à New York, il a conçu le projet de créer un groupe qui incarnerait ses idées artistiques. En présentant quelques-uns des s
Quand le Christ se fit Roi : genèse de la monarchie de droit divin en Occident
par Mathieu Arsenault ~ Prix des professeurs
Depuis à peine trois siècles, l’Occident a renoué avec une philosophie politique républicaine héritée de l’Antiquité, selon laquelle la légitimité du gouvernement repose sur la délégation du pouvoir par l’ensemble des individus qui forment la Nation. Cette réapparition récente du gouvernement démocratique induit la disparition de la monarchie, gouvernement d’un seul dans lequel l’autorité du chef d’État est déléguée par un Dieu unique qui désigne le monarque. Face au caractère incongru des monarchies de droit divin au XXIe siècle, il nous paraît pertinent de remonter aux origines romaines de cette institution qui colore toujours la réalité politique canadienne. La compréhension de l’institution monarchique occidentale passe par un retour à la genèse de la monarchie de droit divin en Occident sous Constantin Ier le Grand, au IVe siècle. Nous verrons pourquoi Constantin a substitué à l’autorité absolue de l’empereur, déléguée par le peuple romain, une autorité d’origine divine et chrétienne. Notre démonstration s’appuiera sur les failles du césarisme, doctrine politique qui mena au morcellement de l’unité de Rome durant le IIIe siècle, ainsi que sur l’introduction du culte du Dieu unique par Constantin, comme remède à l’instabilité et au morcellement politiques de l’Empire romain. Enfin, nous verrons que l’intégration du christianisme au sein de l’Empire prépara l’avenir heureux d’une institution appelée à définir l’Occident durant plus d’un millénaire.
La piraterie : lorsque le mythe éclipse la réalité
par Georges Fortin
La piraterie des XVIIe et XVIIIe siècles a toujours fasciné l’imaginaire. Que ce soit par pur romantisme ou par curiosité, on apprécie les aventures de pirates et elles se vendent toujours très bien. Mais qu’en est-il vraiment? Il est intéressant d’explorer la piraterie sur le plan historique comme un phénomène de contestation sociale. Pourquoi les autorités de l’époque craignaient-elles tant les pirates? Pour les vols de marchandises, pour le meurtre de hauts dignitaires ou simplement parce qu’ils étaient des esprits libres qui ne craignaient ni Dieu, ni le diable? C’est sous cet angle que l’on explorera le monde de la piraterie. On en fera un bref historique, puis on expliquera en détail le mode de vie des pirates pour démontrer que chaque navire pirate formait un État indépendant des monarchies européennes.
La Waffen-SS, armée parallèle du Reich
par Mathieu Lévesque
On tentera de mettre en lumière les étapes du développement de la Waffen-SS qui ont fait de celle-ci, non pas une quatrième branche de l’armée allemande, mais bien une force armée indépendante de la Wehrmacht. Il sera d’abord question des origines de la Waffen-SS durant les années 1930 jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale: mise en place des premières unités armées de la SS, création des premières divisions SS, premières opérations de la SS au combat. On traitera ensuite de l’expansion de la Waffen-SS durant le conflit et de ses impacts sur le reste de l’armée allemande (structure du commandement, recrutement, affectation du matériel, etc.). On traitera enfin du sort de la Waffen-SS pendant et après la défaite de 1945 (crimes commis dans les derniers jours du conflit, perception des membres de la Waffen-SS, procès de Nuremberg).
Benito Mussolini sous la loupe d’Ian Kershaw
par Pierre-Olivier Gagnon
En s’inspirant des théories d’Ian Kershaw sur l’élaboration du mythe du chef, on présentera brièvement les éléments centraux du « mythe Hitler » afin de dresser des parallèles entre ce dernier et celui de son homologue italien, Benito Mussolini.
Cette communication permettra à l’auditoire de se familiariser avec les concepts de base des théories de Kershaw, tels que l’appropriation de symboles culturels et historiques et le « travail vers le Führer », né de l’héroïsation du chef, dans lequel toutes les structures sociales entrent en concurrence pour satisfaire un homme dont le charisme est lui-même une construction sociale. Ces deux principes seront observés dans le cadre d’une mise en parallèle du régime national-socialiste d’Hitler et de celui de son homologue fasciste. À l’idéal germanique d’un Reich millénaire, inspiré par les opéras de Wagner, sera comparé le modèle italien d’un nouvel empire romain; au culte du Führer providentiel, celui du Duce qui rendrait à l’Italie son statut de puissance coloniale.
Pour finir, on exposera les causes de l’échec du mythe mussolinien: en acceptant l’alliance avec Hitler, par lequel il était lui-même fasciné, Mussolini a brisé l’illusion en se reléguant au rang de bon deuxième.
À travers les lentilles de Prokoudine-Gorskii : la Russie et l’Asie centrale
par Jean Lou Castonguay ~ Prix du public
En 1948, la Bibliothèque du Congrès américain achetait la collection de plaques photographiques de Sergei Prokoudine-Gorskii (1863-1944) de ses héritiers. Les 1902 photographies ont été numérisées en 2001 et sont aujourd’hui en libre accès sur le site Internet de la Bibliothèque. La majeure partie de l’œuvre de Prokoudine-Gorskii s’inscrit dans son programme de projections en couleur visant à faire découvrir la Russie aux jeunes de son pays. De 1905 à 1915, il a sillonné l’Empire des tsars et par un procédé de son invention, il a photographié en couleur la Russie du début du XXe siècle, fournissant ainsi un témoignage unique de cette époque.
À l’aide de ces photographies, je propose d’illustrer et d’expliquer certains facteurs de changements en Asie centrale (Ouzbékistan, Kazakhstan, Kirghizistan, Turkménistan et Tadjikistan) liés à la domination d’une puissance colonisatrice, la Russie. Premièrement, je résumerai brièvement les aspects particuliers de l’œuvre de Prokoudine-Gorskii. Ensuite, nous verrons les principales conséquences politiques, économiques, sociales et culturelles de la colonisation sur l’Asie centrale: s’agit-il d’influence ou d’ingérence?
Des fées et des rives
par Jacob Cossette
La pièce de théâtre Les fées ont soif, de Denise Boucher, a été écrite en 1978. Sa création puis l’annonce de sa présentation ont semé la controverse dans le milieu du théâtre québécois. Le Théâtre du Nouveau Monde s’est vu refuser le droit aux subventions du Conseil des arts de Montréal pour présenter la pièce et le clergé est monté aux barricades pour protester contre son contenu.
Celui-ci peut être choquant, en effet. Trois personnages féminins occupent la scène et dénoncent le traitement qu’elles subissent de la part des hommes. La dénonciation se fait par le biais du mariage et de la prostitution, de la violence psychologique et physique. Dans la pièce, la prostituée est violée. C’est de cet aspect que traitera ma présentation. Je démontrerai comment cette pièce s’inscrit dans la mouvance du féminisme radical des années 1960-70 au Québec. Pour ce faire, nous verrons comment le féminisme percevait en 1978 les conséquences du viol sur les femmes, de la prise de pouvoir et de la domination par l’agresseur, ainsi que l’attitude du système judiciaire devant les cas de viol. Ces thèmes rejoignent celui de la réappropriation du corps; c’est ce dont il est question dans la pièce et c’est aussi ce que je souhaite faire ressortir de ma communication.
Châtelaine, reflet des luttes politiques et culturelles
par Nancy Lagacé ~ Prix du public
Le XXe siècle constitue un véritable tournant dans l’histoire des femmes. Elles obtiennent le droit de vote, sont de plus en plus présentes dans la sphère publique et participent aux deux conflits mondiaux. C’est principalement dans le contexte de l’après-Deuxième Guerre mondiale que les femmes des pays occidentaux prennent leur place dans la société. Elles cherchent à se faire entendre en ayant recours à divers moyens. On pense évidemment aux militantes de la cause féministe, mais dans ce cas-ci, plus particulièrement à celles qui ont tenu un discours engagé sur la scène médiatique. Je vous propose donc de prendre l’exemple de Fernande Saint-Martin, rédactrice en chef de la revue Châtelaine, de 1960 à 1973. Lors de sa création en 1960, Châtelaine s’est imposée sur la scène médiatique comme un nouveau type de revue féminine et a rapidement été associée au discours féministe naissant. Peut-on conclure de l’analyse de l’orientation éditoriale de la revue que Châtelaine était une revue féministe durant ses premières années de parution, de 1960 à 1973? Selon moi, bien qu’on puisse y détecter une orientation féministe claire, Châtelaine ne se résume pas uniquement à des positions féministes; elle est également un reflet des luttes politiques et culturelles plus larges de son époque.
Le travail des femmes dans l’industrie manufacturière en 1914-1918 à Montréal
par Rémi Lefrançois
Pendant le premier conflit mondial, les économies des pays belligérants ont été poussées à leur extrême limite et ont dû avoir recours à la main-d’œuvre féminine pour soutenir leur industrie de guerre. Cependant, contrairement à ce qu’on affirme couramment, la main-d’œuvre féminine ne fut pas sollicitée autant au Canada que dans les autres pays de l’Entente. En étudiant la recherche effectuée par Enid M. Price en 1919, Changes in the industrial occupation of the women in the environnement of Montreal during the period of the war, 1914-1918, cette présentation tentera de démontrer que le plus faible engagement militaire des Québécois et des Canadiens en général fut un frein à l’entrée massive des femmes dans l’industrie manufacturière, contrairement à ce qu’on a observé en France et en Angleterre. Cette démonstration se fonde sur une étude comparative du travail féminin au Québec, au Canada anglais, en France, en Angleterre et aux États-Unis, avant la guerre, pendant les années 1914-1918 et dans le processus de reconversion économique qui a suivi la fin du conflit.