Candidat au doctorat en biologie, Olivier Larouche et le professeur Richard Cloutier viennent de publier un article traitant de l’évolution et de la diversification des nageoires chez les poissons dans le prestigieux journal scientifique BMC Biology.

Les chercheurs de l’UQAR et leur collègue Miriam L. Zelditch, de l’Université du Michigan, se sont intéressés à la relation entre la diversité morphologique dans l’organisation des nageoires chez les poissons et une propriété fondamentale dans l’organisation des êtres vivants, soit la modularité. « La modularité signifie que les êtres vivants peuvent être décomposés en sous-unités relativement indépendantes que l’on appelle des modules. Puisque les modules peuvent être dupliqués et individuellement modifiés sans pour autant affecter le reste de l’organisme, la modularité fournit un cadre conceptuel intéressant lorsqu’on s’intéresse à l’origine de l’impressionnante disparité morphologique observée chez les poissons ou à l’apparition séquentielle des différentes nageoires au cours de l’histoire évolutive de ceux-ci », explique M. Larouche.

Les groupes d’organismes vivants diffèrent les uns des autres non seulement quant au nombre d’espèces qu’ils contiennent, mais aussi quant à la diversité des formes corporelles au sein de leurs espèces constituantes. « Les poissons sont reconnus comme étant l’un de ces groupes qui est non seulement extrêmement riche en espèces, mais qui présente en plus une très forte disparité morphologique. Cette disparité morphologique résulte en partie de la diversité dans l’organisation des nageoires : à partir d’un plan de base qui inclut généralement la présence de nageoires médianes (dorsale, anale et caudale) et paires (pectorales et pelviennes), les poissons ont exploré une panoplie de combinaisons possibles », précise le candidat au doctorat en biologie.

Pas moins de 2730 espèces de poissons actuels et fossiles ont été analysées par MM. Cloutier et Larouche. Cette base de données leur a permis de constater une coordination dans la perte ou dans l’addition de certaines combinaisons de nageoires. « Ceci est notamment le cas pour les nageoires dorsale et anale, ainsi que pour les nageoires pectorales et pelviennes. Ces résultats suggèrent que chacune de ces deux paires de nageoires pourraient former des modules évolutifs », indique Olivier Larouche. 

Intitulé Fin modules: an evolutionary perspective on appendage disparity in basal vertebrates, l’article publié en accès libre dans BMC Biology avance que la modularité contribue à favoriser l’émergence de disparité morphologique au sein d’un groupe tel que les poissons. « Certains groupes sont caractérisés par la perte d’une partie des nageoires médianes et paires. À titre d’exemple, chez le poisson lune (Mola mola), les nageoires pelviennes et la nageoire caudale sont absentes. D’autres espèces sont plutôt caractérisées par une multiplication du nombre de nageoires présentes. C’est le cas de la morue (Gadus morhua) qui possède trois nageoires dorsales et deux nageoires anales distinctes », poursuit M. Larouche

En plus d’être extrêmement diversifiés, les poissons représentent aussi le groupe comprenant les vertébrés les plus basaux. « De ce fait, l’identification de modularité dans l’organisation des appendices locomoteurs chez les poissons pourrait aussi représenter une caractéristique généralisée des vertébrés. Cette même caractéristique pourrait être à l’origine de la modification des membres antérieurs ou postérieurs chez des vertébrés plus avancés, par exemple la modification des membres antérieurs en ailes chez les oiseaux et chez les chauves-souris, ou la perte des membres postérieurs chez les cétacés », conclut Olivier Larouche.

L’article Fin modules: an evolutionary perspective on appendage disparity in basal vertebrates peut être consulté ici.