La petite enfance est une période cruciale dans le développement des enfants. Or, les parents qui soupçonnent  leur jeune enfant d’avoir une anomalie ou un retard dans leur développement et qui ont entrepris une démarche d’évaluation diagnostique peuvent attendre plusieurs mois avant qu’un diagnostic soit dûment posé. Développée par des chercheurs de l’UQAR, la plateforme Web PIALEF est appelée à devenir un outil de référence incontournable pour ces parents qui sont souvent laissés à eux-mêmes pendant cette période de grande incertitude et d’absence de services.

Tout au long de la petite enfance, les parents peuvent suspecter une anomalie ou un retard de développement chez leur enfant. Dès qu’il y a un tel soupçon, il ressort que les parents attendent en moyenne cinq à six mois avant d’amorcer une démarche auprès de professionnels pour une évaluation diagnostique (Poirier & Goupil, 2008; Siklos & Kerns, 2007). Pour les parents, cette première démarche est marquée par plusieurs difficultés tel que le peu de considération de certains professionnels au sujet de leurs préoccupations vis-à-vis de leur enfant ou le manque d’informations sur les exigences et les démarches nécessaires pour obtenir un diagnostic et des services (Chamak, Bonniau, Oudaya, & Ehrenberg, 2011). Ils consultent généralement plusieurs ressources avant de trouver la bonne porte d’entrée (Protecteur du citoyen, 2009).

Une fois la démarche d’évaluation amorcée, le temps requis pour établir un diagnostic chez un jeune enfant peut être relativement long. L’expertise de différents professionnels, médecins spécialistes, orthophonistes, ergothérapeutes, physiothérapeutes, psychologues, ou autres, est souvent nécessaire. Ils proviennent parfois du même établissement ou encore d’établissements différents, ce qui exige une transmission d’informations et une concertation efficaces. Cette période d’évaluation diagnostique est une période au cours de laquelle la famille est souvent laissée à elle-même. Pour elle et pour l’enfant, il s’agit pourtant d’une période cruciale.

Ces familles n’ont pas vraiment accès à des services d’intervention précoce. Actuellement au Québec, pour accéder à de tels services provenant d’un centre de réadaptation en déficience physique (CRDP) ou d’un centre de réadaptation en déficience intellectuelle et en troubles envahissants du développement, l’enfant doit généralement avoir un diagnostic dûment établi. Pourtant, les besoins de soutien chez ces enfants et leur famille commencent dès qu’il y a présomption d’une déficience. Le sentiment d’impuissance, le stress lié à l’incertitude et à l’attente peuvent avoir des effets négatifs sur la famille, sur le couple et le développement de l’enfant (Ahern, 2000).

C’est dans ce contexte que, grâce au soutien de la Fondation de l’UQAR, la plateforme Web – a été développée par le professeur Hubert Gascon et son équipe en sciences de l’éducation du campus de Lévis. « L’intervention précoce chez les enfants est un moyen reconnu pour augmenter leur potentiel de développement de leurs capacités », indique le professeur Gascon.

Proposant une réponse novatrice à des besoins qui ne sont pas comblés par le réseau de la santé, PIALEF se démarque par son utilisation de l’Internet comme outil d’intervention à distance. La plateforme propose, entre autres, des Trucs et astuces afin de soutenir le rôle éducatif du parent et le développement de l’enfant sur les plans de la communication, du langage, de la lecture et de l’écriture, de l’exploration, de l’organisation sensorielle, du développement socio-émotionnel et de la motricité. Ces outils interactifs sont une traduction et une adaptation de la dernière version du New Portage Guide : Birth to Six, un guide d’intervention précoce largement utilisé aux États-Unis.

Le volet Outils complémentaires et Informations comprend, par ailleurs, des activités adaptées à chaque catégorie d’âges de même que des illustrations de matériel éducatif et de jouets. Que ce soit par le biais de comptines sous forme de vidéos ou de propositions de livres ou de jeux, le parent utilise ces moyens ludiques afin de stimuler le développement et l’acquisition d’une plus grande autonomie chez son enfant. Des liens Internet et des documents pertinents sur le développement de l’enfant validés par des professionnels sont également suggérés dans cette section de PIALEF.

Afin de briser l’isolement des parents, un Espace clavardage a été développé sur PIALEF. Favorisant l’entraide mutuelle, les forums de discussion permettent aux utilisateurs de la plateforme Web d’échanger de l’information et de partager leur expérience personnelle. Des personnes ressources qualifiées participent également aux échanges. Les usagers de PIALEF peuvent en outre obtenir un Rendez personnalisé avec une personne ressource prenant la forme de visioconférence, d’appel téléphonique et de messages écrits. Notons que c’est le parent qui détermine le moment de rencontre.

Voilà plus de cinq ans que les bases du projet PIALEF ont été posées. Après avoir conçu et réalisé la plateforme Web, l’équipe du professeur Gascon vient de passer à sa mise à l’essai. Ce sont 25 familles qui seront inscrites simultanément à PIALEF, leur inscription prenant fin lorsqu’un diagnostic sera établi et que l’enfant aura accès à des services. Durant la période de mise à l’essai d’une durée de 18 mois, l'Institut de réadaptation physique de Québec (IRDPQ), partenaire du projet, dirigera les parents vers la plateforme Web.

La fonctionnalité de PIALEF fait en sorte qu’elle pourrait être implantée dans toutes les régions du Québec. « Ultimement, notre objectif, c’est que la plateforme soit déployée dans plusieurs établissements de première ligne, comme les CSSS qui ont des programmes à la toute petite enfance », mentionne M. Gascon. « Derrière tout ça, l’idée, c’est d’outiller les parents afin qu’ils se sentent davantage en confiance face à leur enfant et de les renforcer pour faire face à une situation de grande incertitude et de stress », précise le professeur membre du Groupe APPSO.

Plusieurs personnes ont travaillé au projet PIALEF, dont la direction est assumée par Hubert Gascon. Les professeurs Isabelle BeaudoinDominic Voyer et Pauline Beaupré se sont impliqués dans le projet, en plus de plusieurs auxiliaires et professionnels de recherche. Les principaux partenaires sont l’Association du Québec pour l’intégration sociale, le Portage Project (CESA5, Wisconsin) et l’IRDPQ.