Véritable passionnée de la nature et des grands espaces, la diplômée en biologie (2013) et océanographie (2017), Valérie Massé-Beaulne, aura eu la chance de participer à une mission en Argentine sur le Coriolis II, le navire de recherche de l’UQAR, durant sa formation universitaire. 

Aujourd’hui à l’emploi de Pêches et Océans Canada à l’Institut Maurice-Lamontagne de Mont-Joli, elle concentre ses interventions sur un phénomène qui prend de l’ampleur au Québec: les espèces aquatiques envahissantes. Rencontre avec une biologiste dynamique qui n’hésite pas à s’impliquer bénévolement afin de donner le goût des sciences aux jeunes dans les écoles de la région.

Quels sont vos mandats actuels chez Pêches et Océan Canada?

Je travaille sur le monitorage des espèces aquatiques envahissantes au Québec et la préparation d’une publication (Avis scientifiques) pour les utilisateurs de petits bateaux sur les plans d’eau partout au Canada. Il s’agit de suggérer les meilleures pratiques pour l’entretien des petites embarcations afin d’éviter la propagation des espèces aquatiques envahissantes. Il n’existe aucun standard pancanadien actuellement.

Quel est votre territoire d’action?

Notre équipe de travail fait le suivi des espèces aquatiques envahissantes partout au Québec, toutefois, mon territoire d’action est principalement en milieu marin, particulièrement aux Îles-de-la-Madeleine, car c’est l’endroit où on en trouve le plus annuellement. Nous avons également établi des partenariats avec des organismes de certaines régions du Québec, dont des aquaculteurs, pour effectuer le travail sur le terrain.

Dans les médias, on entend régulièrement parler de la carpe asiatique dans les environs de Montréal. Existe-t-il d’autres espèces envahissantes au Québec et au Canada?

Il en existe de plus en plus au Québec comme les moules zébrées (système des Grands Lacs) que l’on connait depuis plusieurs années, l’ascidie jaune (se fixe sur les structures des ports de mer), le myriophylle à épis (dans les lacs, dont le Témiscouata) et la croûte de dentelle (sur les algues laminaires).

Selon Pêches et Océans Canada, après la perte d’habitat, les espèces aquatiques envahissantes représentent la deuxième menace la plus importante pour la diversité des écosystèmes de la planète. Elles perturbent les ressources aquatiques en :

  • Réduisant la biodiversité et la qualité de l’habitat;
  • Supplantant les espèces indigènes et compromettant leur survie;
  • Coûtant beaucoup d’argent aux industries aquatiques;
  • Nuisant aux activités récréatives.

Sera-t-il possible de les éradiquer selon vous?

Une fois établie, il est très difficile d’éradiquer une espèce envahissante d’un environnement. Toutefois, il est possible de limiter et de gérer sa propagation, avec la collaboration des citoyens, entre autres, des programmes de sensibilisation et des mesures claires. Mieux vaut toujours prévenir que guérir!

Pourquoi un tel phénomène se produit-il dans nos eaux?

Ce sont généralement des espèces qui s’adaptent et se propagent rapidement, sans avoir de prédateur naturel dans leur nouvel environnement. Il existe plusieurs vecteurs de propagation, qu’ils soient humains (ex. : introduction par bateaux et embarcations nautiques) ou naturels (ex. : réchauffement climatique). Avec l’augmentation massive du transport maritime, les risques de propagation se sont considérablement amplifiés avec le temps.

Collecteur à espèces envahissates retirés des quais de Cap-aux-Meules aux Îles-dela-Madeleine. (Crédit photo : courtoisie)Collecteur à espèces envahissates retirés des quais de Cap-aux-Meules aux Îles-dela-Madeleine. (Crédit photo : courtoisie)Dès la fin de vos études, vous avez obtenu différents mandats pour le MPO. Qu’y faisiez-vous au juste?

J’ai débuté à Pêches et Océans Canada en 2017, comme technicienne en sciences aquatiques puis comme biologiste en caractérisation des zones côtières marines au Québec. J’ai ensuite poursuivi mon expérience en tant qu’analyste aux examens réglementaires à la protection du poisson et de son habitat.

Durant vos études à la maîtrise à l’UQAR, vous avez eu la chance de vivre une belle expérience en Argentine. Qu’en était-il?

J’ai eu la chance extraordinaire de réaliser mes travaux de terrain de maîtrise en Argentine, au large de la Patagonie, dans le Golfe San Jorge. J’ai passé près d’un mois en mer, avec les lions de mer et les manchots, afin de mieux comprendre le rôle des organismes microbiens dans le fonctionnement écosystémique du Golfe San Jorge. Une expérience enrichissante, psychologiquement et physiquement très intense qui m’a amenée à repousser mes limites.

Demain matin, si vous pouviez réaliser un rêve professionnel, quel serait-il et pourquoi?

Faire de la recherche en Antarctique! Ou du moins, aux pôles de la planète. Ces endroits hostiles présentent des conditions extrêmes pour la vie, et pourtant, il y en a! Je suis curieuse et mon esprit d’aventure serait comblé de vivre une expérience en dehors du commun. Je trouve fascinant de réaliser que nous ne savons pas grand-chose de ces milieux fragiles, entre autres, face aux espèces envahissantes.

Vous faites beaucoup de bénévolat auprès d’organismes comme Les filles et les sciences ou Expo-sciences à titre de juge de la compétition. Que vous apportent ces implications et quelle est votre principale motivation?

Un sentiment de partage, de découverte, d’accompagnement, et surtout, les jeunes m’apprennent tant de choses! Ma motivation est de leur exprimer toute l’admiration que j’ai pour eux avec le temps que je leur octroie. C’est ma manière de les remercier grandement de s’impliquer, de se dépasser et de parler de sciences! Tout esprit curieux mérite d’être nourri de connaissances.