La recherche sur les environnements nordiques a pris un nouvel essor à l’UQAR avec la création de BORÉAS il y a 20 ans. Ce groupe de recherche a contribué à former de nouvelles générations de personnes impliquées en recherche et à rassembler des spécialistes en biologie, en géographie, en chimie, en sciences de la santé et en génie autour de la thématique originale de la nordicité. 

Le nom BORÉAS est inspiré de la mythologie grecque, car c’est ainsi que l’on désigne le dieu du vent du Nord et père de la neige. « Les origines du groupe de recherche sur les environnements nordiques BORÉAS remontent à 2002 », précise son directeur, le professeur Luc Sirois. « Au départ, le groupe s’appelait Bionord et rassemblait des biologistes s’intéressant à la biodiversité en milieu nordique. Or, au fil du temps, des géographes de l’UQAR avec leurs expertises en géomorphologie et en archéologie se sont joints au groupe en 2009. Peu après, des collègues en chimie et en kinésiologie se sont ajoutés, puis plus récemment en génie, pour épauler l’effort de recherche nordique à l’UQAR. »

BORÉAS compte 25 membres réguliers et collabore avec une centaine de scientifiques de partout dans le monde, notamment en Norvège, en Finlande, en Islande, au Chili et aux États-Unis. Le dynamisme de BORÉAS a permis à l’Université du Québec à Rimouski d’inscrire la nordicité parmi ses axes d’excellence en 2005. « La recherche sur la nordicité a connu un bel essor au cours des années. Aujourd’hui, 30 % du corps professoral de l’UQAR travaille sur les enjeux liés à la nordicité », observe la vice-rectrice à la formation et à la recherche, Dominique Marquis.

Les recherches des membres de BORÉAS se concentrent sur les grands bouleversements environnementaux auxquels font face les sociétés humaines. « Les humains de toutes les cultures sont désormais des témoins directs des répercussions locales des changements globaux. C’est une situation sans précédent dans l’Histoire. Pour leur part, les scientifiques mesurent patiemment depuis de nombreuses décennies plusieurs indicateurs qui convergent vers un constat implacable : l’habitat de la planète Terre se dégrade à la vitesse grand V pour un très grand nombre d’espèces et de populations biologiques engagées dans le tourbillon de la sixième extinction », indique le professeur Sirois.

La pression exercée par les humains sur la biosphère est telle que le fonctionnement des systèmes atmosphériques et des écosystèmes en est perturbé, poursuit le professeur Sirois. « BORÉAS s’engage depuis sa création à comprendre les répercussions des changements globaux dans les régions nordiques et l’adaptation des humains à ces conditions nouvelles. Cela se fait, tant par des études fondamentales que par des recherches appliquées, à des échelles qui vont du domaine moléculaire jusqu’au biome dans son entier. »

Des enjeux mondiaux

Plusieurs projets de recherche menés par des membres de BORÉAS visent à mieux comprendre les changements globaux et leurs impacts. « L’augmentation des gaz à effet de serre (GES) entraîne un réchauffement global des températures, sans compter l’ensemble des activités humaines qui entraîne de profonds bouleversements dans les écosystèmes. Par exemple, les travaux réalisés par les membres de BORÉAS examinent les mécanismes physiologiques et évolutifs de l’adaptation des espèces de poissons et de crustacés aux nouvelles conditions océaniques d’eau plus chaude et plus acide. D’autres travaux réalisés par nos collègues en archéologie, en kinésiologie et en génie scrutent diverses dimensions de l’adaptation des humains aux conditions de vie dans la nordicité », note le professeur Sirois.

D’autres travaux apportent un éclairage nouveau sur les relations entre les espèces et les phénomènes saisonniers au sein des écosystèmes terrestres. « Les populations autochtones des régions nordiques font grandement usage des ressources que leur procure la nature. De quelle manière les changements environnementaux dans l’Arctique se répercuteront-ils sur ces ressources? C’est dans ce contexte que les membres de BORÉAS développent des connaissances fondamentales en amont des stratégies adaptatives qui devront être inventées pour ces sociétés autochtones de contrées lointaines, comme c’est aussi le cas pour nous, ici, sur les bords du Saint-Laurent », poursuit le directeur de BORÉAS.

L’enjeu de l’érosion côtière, qui affecte particulièrement les populations riveraines depuis l’Arctique jusque dans l’estuaire du Saint-Laurent, est un autre thème de recherche central de plusieurs membres de BORÉAS. « La hausse des niveaux marins qui résulte du réchauffement du climat et l’augmentation du trafic maritime entraînent inexorablement une part de risque. Plusieurs membres de BORÉAS, des géographes, des ingénieurs, des biochimistes, des biologistes, sont activement impliqués dans l’étude des mécanismes physiques et géomorphologiques associés aux risques d’érosion côtière ainsi que dans la mise au point de mesures d’atténuation de ces aléas lors d’expériences à l’échelle opérationnelle sur le territoire. Plus encore, d’autres membres de BORÉAS œuvrent en amont d’une catastrophe pétrolière maritime dans nos eaux glacées en étudiant la physiologie et le comportement de la moule bleue vis-à-vis des hydrocarbures », ajoute le professeur Sirois.

La conservation de la biodiversité et l’aménagement du territoire sont aussi des thèmes étudiés depuis plusieurs années, souligne le directeur de BORÉAS. « Un des principaux facteurs de transformation environnementale dans la région est sans conteste l’exploitation forestière. Depuis un siècle, nos pratiques sylvicoles ont engendré de profondes modifications de la composition floristique et de la structure du couvert forestier, poussant certaines espèces animales au bord de l’extinction, comme le caribou forestier, et d’autres en surpopulation, comme les orignaux. Les membres de BORÉAS déploient des efforts considérables pour comprendre les mécanismes et les implications de ces changements d’habitat dans le fonctionnement de l’écosystème forestier. Les connaissances qui en découlent sont à la base des innovations nécessaires pour atteindre la soutenabilité dans nos rapports d’usage avec les écosystèmes que nous habitons. »

Au fil des ans, plus de 500 chercheuses et chercheurs en nordicité ont été formés par des membres de BORÉAS. Si la pertinence de leurs travaux de recherche n’est plus à prouver, il reste que les défis pour répondre aux enjeux inhérents à la nordicité sont de plus en plus grands. « BORÉAS a acquis une belle maturité comme groupe de recherche. Notre groupe souhaite accroître la diversité de ses modèles d’études et de ses champs d’intervention. Nous y parviendrons en cultivant notre capacité collective à mobiliser le talent et la capacité d’innovation qu’il y a parmi nous pour relever les défis environnementaux actuels et ceux des générations futures », conclut le professeur Sirois.