Merinov et l’UQAR ont mis au point un prototype de système à double seuil de rupture qui permet à la fois de remonter des casiers à crabe des neiges durant la pêche, tout en se rompant lorsqu’une baleine exerce une pression sur le cordage afin de faciliter son désempêtrement.

Cette nouvelle technologie viendra répondre aux exigences éventuelles du gouvernement fédéral imposées aux pêcheurs d’utiliser des équipements sécuritaires et qui garantissent une meilleure protection pour les mammifères marins, en particulier la baleine noire de l’Atlantique Nord, une espèce en voie de disparition.

« Ce qui est innovant, avec cette technologie, c’est que ces maillons faibles peuvent résister à des tensions élevées lorsque les pêcheurs remontent leurs casiers, mais lorsque la baleine va mettre de la tension sur le cordage lorsqu’elle est empêtrée, le maillon faible, au bout de quelques minutes, va se déclencher pour faciliter la libération de la baleine. Donc l’innovation réside dans ce double comportement », explique Jérôme Laurent, chercheur industriel chez Merinov.

Le seuil de rupture pour les baleines a ainsi été établi à 771 kg (1700 livres) et le seuil pour les casiers de pêche au crabe des neiges à 1588 kg (3500 livres), à la fois selon les données scientifiques disponibles et les mesures prises en mer par les équipes de Merinov à bord des bateaux de pêche. Pour ce projet de conception de maillon faible, Merinov a réuni le financement nécessaire au projet, a défini les besoins des pêcheurs, a agi comme interlocuteur auprès d’eux et des spécialistes en mammifères marins, tout en mettant en place le protocole scientifique à respecter lors des essais en mer. De son côté, l’équipe de génie de l’UQAR a conçu et assuré le prototypage de cette technologie, tout en mettant à l’épreuve les prototypes sur son banc d’essai.

« Ce qui est extraordinaire avec le prototype de maillon faible, c’est que les essais répétitifs et nombreux en laboratoire ont permis d’amener des résultats précis qui ont fait en sorte que les résultats se sont répétés lors des sorties de pêche simulée, ce qui nous permettra d’aller de l’avant avec la production d’un plus grand nombre de prototypes afin de multiplier les essais en mer et commercialiser cette technologie dans un avenir rapproché », indique le professeur en génie mécanique Noureddine Barka.

La commercialisation et la mise en marché seront assurées par trois partenaires d’affaires, dont le pêcheur de crabe des neiges Daniel Desbois et acteur clé de ce projet de recherche industrielle. « En tant que pêcheur de crabe des neiges et de représentant de l’Association des crabiers gaspésiens, je suis convaincu que cette technologie va répondre à la fois aux attentes des pêcheurs et de Pêches et Océans Canada, parce que l’équipement est facile d’utilisation pour les pêcheurs, il ne change pas leurs habitudes de pêche et il permet à une baleine de se désempêtrer plus facilement en diminuant la tension de façon importante. C’est gagnant pour tout le monde », souligne M. Desbois, qui est aussi copropriétaire et président des Industries Fipec Inc.

Pour M. Desbois, cette technologie permet de répondre à plusieurs objectifs, soient une meilleure protection des baleines et mammifères marins, d’assurer des pêches plus écologiques et responsables, ainsi que le maintien des emplois pour les pêcheries.

Selon le Marine Mammal Protection Act (MMPA), les produits de la pêche exportés vers les États-Unis sont classés selon la fréquence des prises accessoires de mammifères marins. Dans ce contexte, le pays exportateur, dans ce cas-ci le Canada, doit démontrer qu’il impose des mesures pour réduire ces prises accidentelles. L’enjeu est majeur, puisque le Canada exporte plus de 60 % de ses produits de la mer aux États-Unis.