Des chercheurs de l’Institut des sciences de la mer (ISMER) de l’UQAR et leurs collègues viennent d’identifier l’empreinte sédimentaire de plusieurs tsunamis dans un enregistrement sédimentaire remontant jusqu’à 3500 ans dans un lagon côtier au large de Saint-Martin, dans les Antilles. Publiée dans la revue Marine Geology, l’étude repose sur une utilisation novatrice de la microtomographie par rayons X (micro-CT) pour déterminer l’orientation individuel des grains contenus dans une carotte sédimentaire.
Alors chercheur postdoctoral à l’ISMER, Stefano Fabbri a dirigé cette recherche qui a combiné des analyses géochimiques, la sédimentologie et la datation au radiocarbone. « Notre étude a examiné les enregistrements sédimentaires afin d’identifier les événements d’ondes extrêmes, en particulier les ouragans et les paléo-tsunamis, dans une lagune côtière de l’île de Saint-Martin. Nous avons observé que Saint-Martin a enregistré les deux types d’événements dans une seule lagune, ce qui le rend extrêmement précieux en tant qu’archives naturelles pour les paléo-tsunamis et les ouragans et, par conséquent, en tant que site de référence potentiel pour la distinction des types d’événements. »
L’équipe de recherche a analysé sept carottes sédimentaires avec un micro-CT afin et d’autres analyses d’établir différentes signatures géochimiques et sédimentaires. « Nous avons pu identifier cinq des sept événements comme de possibles paléo-tsunamis, avec des âges radiocarbones allant de ~3350 ans cal BP à ~600 ans cal. BP. Nous avons même trouvé des grains pouvant être associé au tsunami transatlantique de Lisbonne de 1755 CE, donc un tsunami qui aurait traversé tout l’Atlantique ! », indique Guillaume St-Onge, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en géologie marine, qui a dirigé M. Fabbri dans le cadre de son stage postdoctoral à l’ISMER.
Cette recherche réalisée à Saint-Martin va permettre de mieux comprendre le développement à long terme de l’activité sismique des Petites Antilles et la fréquence à laquelle les tremblements de terre peuvent entraîner des tsunamis. « En utilisant les données de micro-tomographie des dépôts sédimentaires, nous avons travaillé sur des critères de distinction spécifiques entre les tsunamis et les tempêtes, car les signatures sédimentaires sont extrêmement similaires. En outre, l’utilisation de données de micro-tomographie pour reconstituer les directions et les intensités des vagues de tsunamis passées semble une approche très prometteuse », estime M. Fabbri.
Une équipe internationale a pris part aux travaux de recherche avec les deux chercheurs de l’ISMER grâce à une subvention de l’Institut France-Québec maritime (IFQM). Il s’agit de Pierre Sabatier, Amélie Lothoz, Fabien Arnaud et Maude Biguenet (Université Savoie Mont-Blanc), Raphaël Paris, Simon Falvard et Saptarshee Mitra (Université Clermont Auvergne), Nathalie Feuillet et Louise Cordrie (Institut de physique du globe de Paris) ainsi que Thibault Coulombier et Éric Chaumillon (Université de la Rochelle).
« Ce projet de recherche a permis une collaboration France-Québec des plus intéressante. Ce fut une occasion unique de profiter de l’expertise et des connaissances spécifiques de différents laboratoires et de faire l’expérience de différentes cultures dans le cadre d’un seul et même projet. C’est ce qui rend cette collaboration si précieuse et unique », souligne Stefano Fabbri. On peut lire l’article « Deciphering the sedimentary imprint of tsunamis and storms in the Lesser Antilles (Saint Martin): a 3500-year record in a coastal lagoon » ici.
Originaire de Bâle, en Suisse, M. Fabbri a entrepris son postdoctorat à l’ISMER en janvier 2023. « Auparavant, j’ai travaillé sur le même projet en France, pendant neuf mois. Je voulais faire l’expérience du Canada et la combiner avec une institution qui dispose d’un laboratoire fortement axé sur les sciences maritimes et d’un environnement qui combine la géophysique et la géochimie. L’ISMER offrait tous ces aspects. »
À la suite à son séjour à l’ISMER, Stefano Fabbri est récemment retourné en Suisse pour réaliser un autre postdoctorat. « Je vais continuer à combiner les aspects géophysiques de la sédimentologie lacustre et marine avec des approches géochimiques et paléomagnétiques pour reconstituer les tremblements de terre et les tsunamis du passé autour du globe », conclut le titulaire d’un doctorat en géologie science de la terre (géologie) de l’Université de Berne.
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